"La suppression de la propriété privée... suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».
Marx (L'idéologie allemande)

«Devant le déchaînement du mal, les hommes, ne sachant que devenir,
cessèrent de respecter la loi divine ou humaine. »

Thucydide

jeudi 29 juillet 2010

NI CHOMEUR INDEMNISE NI RETRAITE ! CREVEZ LA GUEULE OUVERTE !


RECULER LA RETRAITE = PROLONGER LA MENACE DU CHOMAGE

Le secret de la saloperie gouvernementale du recul de l’âge de la retraite est enfin dévoilé : c’est accroitre le nombre de chômeurs sans défense et dont les syndicats se battent les couilles !
On nous amuse cet été avec la surexposition des actes de violence et la focalisation sur les Roms boucs émissaires. On fait passer le temps avec le scandale Bettencourt qui n’est tout au plus qu’un feuilleton puant le fric pour éloigner de l’essentiel, la politique drastique d’attaque sans vergogne par le gouvernement d’une classe ouvrière impuissante, non représentée et en état de catatonie vacancière.
Le plus scandaleux reste toujours opaque : comment indemniser a minima et ne pas laisser crever de faim chômeurs plus nombreux et retraités encombrants ? Pour éviter le plus génial : l’attaque révolutionnaire des grands centres administratifs de l’Etat, de ses syndicats et partis politiques !
La presse d’Etat feint l’étonnement avec un cynisme sans nom : «La réforme des retraites va-t-elle augmenter la facture de l'indemnisation pour l'assurance chômage ? Certainement, si l'on en croit une étude de Pôle emploi sur l'impact financier pour l'Unedic du report de 65 à 67 ans de l'âge de départ avec une pension complète même si l'on n'a pas suffisamment cotisé.
Actuellement, tout demandeur d'emploi âgé de 61 ans peut, sous certaines conditions, demander le maintien de son allocation chômage jusqu'à ses 65 ans s'il n'a pas le nombre de trimestres nécessaires pour bénéficier d'une pension complète. Environ 9500 personnes sont dans ce cas, cette année, et dépendent donc de l'assurance chômage et non pas de la caisse d'assurance vieillesse. Montant de la facture pour l'Unedic : 80 millions d'euros. Le report de la retraite à taux plein même avec une carrière incomplète de 65 à 67 ans entraînerait une hausse du nombre de bénéficiaires et générerait un surcoût annuel de 265 millions d'euros, selon l'Unedic. Ce n'est pas tout. Le report de l'âge légal de départ de 60 à 62 ans aurait également des conséquences financières pour l'assurance chômage dans un pays où les entreprises se débarrassent volontiers de leurs salariés les plus âgés et ne sont guère enclines à recruter des seniors. Un chiffrage doit être fourni aux partenaires sociaux en septembre ».
Voilà donc ce qui est dans l’escarcelle du gouvernement pour la « négo » avec les syndicats en septembre : le jeu des vases communiquants ! Outre que les syndicats n’ont rien à proposer ni à opposer, cette proposition d’alléger les caisses de retraite pour pomper celles de l’Unedic, se double d’un mensonge culotté des médias : « Avec le recul de l'âge de départ, des salariés âgés sans emploi partiront plus tard et seront donc indemnisés plus longtemps ». C’est se foutre carrément de la gueule du monde ! Malades, handicapés, leurs longs séjours au chômage les ayant complètement démoralisés, les nombreux travailleurs « malchanceux » vont en effet vivre jusqu’à 99 ans d’amour et d’eau fraîche sur une chaise roulante !
Le sous-fifre de Sarko, Laurent Wauquiez, le secrétaire d'État à l'Emploi ment encore et toujours sur le changement (impossible) de mentalité des patrons à l’égard des « vieux » travailleurs ; et une pouffiasse quelconque, méprisable bourgeoise planquée, Marie-Claire Carrère-Gee, la présidente du Conseil d'orientation pour l'emploi dit aux seniors de se démerder : z’ont qu’à imaginer un système de bonus-malus des cotisations chômage !
Ainsi face à la lâcheté de la gauche bourgeoisie et à la débandade des collabos syndicaux, le gouvernement continue son bourrage de crâne. En prétendant vouloir résorber les déficits par le recul de l’âge de la retraite, il se démasque en révélant que ce n’est qu’un jeu de chaises musicales :
1. Il reporte le problème d’une caisse d’Etat vers une autre plus apte à « économiser » au goutte à goutte contre des ouvriers sans défense !
2. Il fragilise encore plus les vieux travailleurs car « reculer la retraite » c’est prolonger l’inquiétude et la « névrose » du chômage !
3. Il terrorise les travailleurs plus âgés car, à la différence de la retraite, où la pension tombe tous les trois mois, sécurisante ; au chômage l’Unedic peut te rayer à tout moment des listes des « mendiants indemnisés » et te jeter à la rue sans ressources !
4. Il sait très bien qu’il est plus facile de radier un chômeur que de sucrer une retraite, et que l’Unedic peut équilibrer ses comptes en multipliant les provocations imparables : au bout de trois refus d’un emploi de merde, c’est un poids de moins pour la principale caisse radine de l’Etat !
5. Cette histoire de retraite partielle à 61 ou 62 ans et possiblement complète à 67 ans, signifie le refus d’accepter les chômeurs à la retraite, en espérant qu’ils seront crevés avant !

UNE STRATEGIE D’HUMILIATION DES PROLETAIRES

En réalité, globalement, « pôle emploi » n’a rien à proposer de sérieux aux travailleurs de 50 à 70 ans. Il faut au « mendiant assisté » passer devant une série de gugusses fonctionnaires impuissants, parfois désagréables, et souvent humiliants :
- justifie que tu cherches du boulot ! Reconnais qu’en attendant la société fait un effort pour toi ! Mais nos efforts ne sont pas éternels ! Toi, ancien technicien de maintenance, toi ex-ingénieur-conseil, tu t’es permis de refuser par trois fois un emploi de livreur de pizza, puis un emploi de laveur de carreau et enfin un emploi de service à la personne… comment veux-tu que la société puisse continuer sans déficit avec des gens comme toi ?
- tu viens te plaindre de ton isolement et de ton angoisse, mais qu’as-tu fait pour en sortir ? Tu t’es laissé aller à boire et à dormir, et tu imagines qu’on ne peut pas liquider ton dossier ! Tu rêves ou quoi ?

PREMIERE CONSEQUENCE DU RECUL DE LA RETRAITE : L’EXPLOSION DU CHOMAGE NON INDEMNISE

Les « vieux » travailleurs étaient déjà nombreux à être rejetés par l’industrie sarkozienne - pas besoin de se soucier des lois votées par les nobles parlementaires ni de supputer un coup d’arrêt par les promenades syndicales à la rentrée – le chômage va exploser dans l’individualisation des cas. La force de la bourgeoisie est d’isoler les travailleurs « malchanceux » comme elle a émietté les grandes concentrations industrielles depuis 30 ans.

Une véritable société humaine aurait fait cesser ce chantage perpétuel à la faim et à la misère pour tous ceux qui sont victimes de « la crise » ou des « patrons voyous », on partagerait, on ne laisserait pas dans l’isolement suicidaire… mais je m’égare, il faut d’abord une révolution sanglante pour déloger les pourritures bourgeoises et leurs gangsters armés, et le prolétariat n’a pas assez bouffé de vache enragée encore (bien qu’on soit en passe de lui resservir des farines animales). Il est reproché à cette masse de bestiaux modernes, par la féodalité bourgeoise, de persister à vivre plus longtemps et de prétendre tenir debout avec « des droits humains » au-delà de 70, 80 ans. Le plus suave des excrétions de l'oligarchie bourgeoise est que ces reproches proviennent des despotes gérontocrates gouvernants derrière les jeunes loups industriels de l’équipée Sarkozienne; dont Mme Bettencourt n'est que la généreuse "fleur".

Oui plus l'âge de la retraite est repoussé, plus il y aura de chômeurs à indemniser plus longtemps. Oui plus l'âge de la retraite sera repoussée plus il y aura d'arrêt-maladies et d'ALD à indemniser plus longtemps. Oui plus l'on partira tard à la retraite, moins l'on aura d'année en "bon état" à vivre sans retraite au final!
Sire, ce n’est pas de la retraite donc que nous avons besoin, mais bien d’une révolution, très sanglante !
Quand est-ce qu’on manifeste en masse après avoir commencé par casser la gueule aux militants syndicaux ?

mardi 27 juillet 2010

VOUS ETES EN DANGER ? APPUYEZ SUR LA TOUCHE ETOILE…


















(Il n’y a plus d’interlocuteur au numéro que vous avez demandé)



« Peut être est-ce encore l’innocence qui réussit le plus facilement en ce monde à travers le chaos des éléments... » . Kafka, La Métamorphose
«Quand j'appelle une entreprise, je voudrais parler à un être humain » Matthews – Gordon (inventeur de la messagerie vocale).


UNE MISE EN DANGER DE LA VIE D’AUTRUI

Vous êtes souvent en colère lorsque vous appelez une administration, un des derniers services publics, une compagnie d’internet, une compagnie d’assurance, un dispensaire, la Poste, ERDF ou la compagnie Veolia. Vous êtes excédé parce qu’après avoir suivi les consignes de la machine stéréotypée elle vous répond froidement et invariablement: « nous n’avons toujours pas saisi votre message », puis « veuillez recommencer ». Ma dernière déconvenue montre l’irresponsabilité de cette automatisation généralisée dans le cas de ERDF, bâtard d’EDF dérèglementé. Je désirais joindre en urgence le service dépannage. J’avais bien suivi la première indication de la voix neutre de la machine inhumaine : « le numéro de dépannage se trouve sur votre facture ». Quelques minutes plus tard, après avoir tapé 1 ou 2, je ne me rappelle plus, puis étoile ou dièse, la conversation kafkaïenne avec la machine se terminait ainsi : « Veuillez contacter votre fournisseur ! ».
J’étais atterré ! Les « fournisseurs », ces requins du profit comme Poweo, Direct Energie (mafia qui facture illégalement les chèques à 2,99 euros), etc. n’ont pas de service dépannage ! La privatisation d’EDF comme de France Télécom c’est comme les chemins de fer britanniques y a plus personne pour gérer « l’après-vente », « l’entretien », « la sécurité », « l’usure », « l’accident ». Pas grave me direz-vous, tout le monde s’en bat l’œil ! Si c’est grave. Au 141 avenue de la division Leclerc à Gentilly, un coffret répartiteur est brisé et à ciel ouvert. Au ras du trottoir, à la hauteur d’un enfant de trois ans, des câbles de 380 volts sont à nu. Cela fait des mois que l’épicier d’un côté et le restaurateur de l’autre l’ont « signalé » à ERDF. Personne n’est jamais venu. On sait simplement qu’un clochard est mort à cet endroit il y a quelque temps, on ne sait pourquoi. En tant qu’ancien de l’EDF, fier à bras, j’avais assuré les deux commerçants que j’allais faire le nécessaire.
La phrase de la machine « veuillez contacter votre fournisseur » résonne encore dans ma tête. J’ai honte depuis, honte de ce à quoi aboutit la dérèglementation des mannequins de la finance, aussi criminels que les pilotes de chasseurs bombardiers qui ne voient jamais éclater le corps de leurs victimes.
J’ai confectionné avec un carton et du scotch fourni par le restaurateur un faible couvercle de protection et j’ai marqué « danger 380 volts » avec le feutre qu’il m’a fourni. Le vent et la pluie balaieront bientôt ma fragile parade. Un jour un enfant ou un adulte qui trébuchera sera électrocuté et on mettra cela sur le compte de la fatalité.
Puis, prenant du champ, je me suis dit que nous sommes de plus en plus dans une société totalement autiste, cloisonnée par des « machines à communication » hermétiques et bien inventées pour rendre fou en se débarrassant du client, de toute récrimination, de tout compte à rendre, enfin une société à sens unique qui vous met en danger quotidiennement, et qui vise au profit sans limites en se fichant des risques pour la population.

Un Claude Allègre, demi-fou scientifique et conseiller de Sarkozy, ne voit pas d’inconvénient à ce que la police soit privatisée (cf. son livre interview « Les audaces de la vérité ») ; imaginez le répondeur automatisé des polices privées : « Tapez 1 s’il s’agit d’un meurtre, tapez 2 s’il s’agit d’un viol, tapez 3 s’il s’agit d’un vol à l’arraché. Pour toute autre communication ou dénonciation anonyme veuillez contacter votre police de quartier Bouygues Cops ou Vivendi cowboys », et « Votre attente téléphonique peut se retourner contre vous ».

Des groupes de gens désemparés tentent de faire passer le message sans écho de l’Etat autarcique et autiste, avec ses milliers de robots fonctionnaires, impavides exploiteurs du prolétariat : « Nous nous adressons à vous car l’univers kafkaïen de Orange / France Télécom nous y oblige. Les services clients, consommation et recouvrement ne communiquent pas entre eux, chacun vit dans son service, en autarcie visiblement, sans se soucier de ce qui se passe ou se dit ailleurs. Et nous les clients, nous sommes baladés de l’un à l’autre sans jamais pouvoir joindre un vrai responsable avec un nom, un grade… Notre nom à nous ils nous l’ont demandé mille fois, avec notre n° de téléphone, notre n° de client, mille fois nous avons répété la même histoire en refaisant tout l’historique, à des interlocuteurs anonymes sur des plateformes où les responsables leur disaient de raccrocher quand nous devenions trop insistants (hé oui, on a parfois l’ouïe fine !!). Alors quand au bout de trois mois on nous met en service restreint sans nous prévenir et que l’on s’en rend compte au moment où on veut appeler le médecin parce que notre fille a 39° de fièvre et qu’elle tousse… » (lu sur le web).

LA FOLLE TECHNOCRATIE QUI SE FICHE DE LA MAINTENANCE

Dès que vous avez signé un contrat pour une société de téléphonie-internet ou pour une gamme de « chaînes » de télévision, vous ne vous appartenez plus (et en plus vous avez souvent eu la bêtise de vous faire prélever automatiquement par la société suceuse) : VOUS NE POUVEZ PAS RESILIER VOTRE APPARTENANCE AU CAPITALISME. Un exemple suit.
Le mot RESILIER n’existe pas sur le site France Telecom ni sur Orange (ex Wanadoo). Ils ne digèrent pas d’avoir été privatisés et veulent se croire encore indispensables, management technocratique obtus des grandes firmes privées qui fait presque regretter la lourde bureaucratie nationalisée . Sur Orange il est question de déménagement, mais les crétins d’ingénieurs maison ne doutent pas que si vous déménagez vous conserverez le cordon ombilical… Orange. Donc on vous livre la question suivante, que vous n’avez pas posée et que vous n’avez pas envie de poser :
- « Comment conserver ma connexion haut débit après mon déménagement ? »
- Mais je ne veux plus en entendre parler, je veux ré-si-lier !!!
- - contacter « Mon assistance » ; sur quoi on lit : « Comment contacter le service client internet Orange ? » Réponse : sur Orange.fr Rubrique « Mon compte », « bien utiliser l’assistance »
- Vous décidez d’essayer encore le 12 14, la voix suave de la corde vocale maison vous apprend que : « suite à un changement de réglementation le service est désormais accessible par un numéro à six chiffres que vous pouvez trouver en tapant www… bla bla…., donc vous êtes sensé retourner sur internet dans votre quête du Graal qui va vous délivrer de l’immonde chaîne du net Orange.
- Décidant de vous calmer, vous cliquez à nouveau sur « nous contacter », terme avenant et qui doit ouvrir sur une fenêtre sans nul doute conviviale. Cela va de mal en pis. Des crétins de commerciaux ont pensé à vous profondément :
- « Vos questions commerciales avant de contacter le service client Orange… »
- Mais je me fous des questions commerciales, je veux ré-si-lier !
- Qu’à cela ne tienne : « Vérifiez que votre question n’a pas sa réponse… »
- Mais je m’en fous, cela fait une demi-heure que je ne trouve pas ni la question ni la réponse !
- « Bien utiliser le moteur de recherche… »
- Mais le moteur de recherche ne comporte pas le terme ré-si-lier !!! Ah si il y a le terme
- « contact », mais c’est une boucle, il ne sert à établir aucun contact !
- « Utilisez les formulaires de contact… »
- Mais ils sont introuvables les dits formulaires.
- « Mes contacts » ? Ah non, ce sont mes contacts, rien à voir avec Halloween Orange !
- Ah que je suis content, je trouve une ligne : « réclamations par téléphone… nom de dieu ! dans un premier temps écrire au « service national de consommation » à Bordeaux !!!!??
Mon cerveau se rembrunit. Un déclic se produit lorsque je visualise « espace client ». Je pense tenir le bon bout. Hélas, on ne me demande que mes nouvelles coordonnées de déménagement, en parlant à ma place : « je déménage/communique mes nouvelles coordonnées ». Alors j’enrage, je les leur met mes nouvelles coordonnées
- M.Cochondepayant
68 rue de la résiliation75000 Trouduc

Longtemps les boites nationalisées furent considérées comme des parangons de bureaucratie épaisse et inhumaine quand cette bureaucratie existait déjà dans n’importe quelle boite privée. La « privatisation » n’a pas supprimé la bureaucratie, elle l’a aggravé considérablement. Avant vous aviez des agences « physiques », des interlocuteurs, souvent uniques, pas toujours aimables, mais des êtres humains. Avec cette mondialisation de la téléphonie rigide et uniforme la bureaucratie de lourde est devenue affligeante, insultante pour la personne qui quémande. Elle est devenue le symbole de la chosification des rapports non seulement marchands mais humains, devenus mécaniques comme les formulaires administratifs ou les questions des sondages, ou les livrets de garantie de machine à laver : en aucun cas votre question ne peut avoir été oubliée, la liste des questions et des réponses vous est fournie, par conséquent n’essayez pas d’inventer une question de votre cru, elle n’est pas plausible de toute façon et vous dérangeriez « l’institution commerciale » qui a fait l’effort de s’aligner sur le modèle de messagerie vocale du monde entier ou plutôt de toutes les entreprises capitalistes de la planète. Pensez : on est si nombreux, que pourrait bien gérer une entreprise sans messagerie vocale ? C’est comme si vous demandiez à ERDF de cesser de faire tourner les centrales nucléaires et de faire revenir les livreurs de charbon de Lozère à Paris !
Vous rêviez encore à cette secrétaire de direction qui se fadait incontinent des appels téléphoniques incessants jadis pour votre seule jouissance de petit client individuel ? Et bien dansez maintenant, il n’y a plus d’interlocuteur au numéro que vous avez demandé, réparez vous-même votre panne ou achetez une autre machine ; pour votre bien nous sommes plusieurs concurrents sur le marché, si vous êtes pas content, allez voir ailleurs !

Qui est l’imbécile qui a inventé la messagerie vocale ? (ou vmail)

Un certainWilly Müller a inventé le répondeur automatique vers 1935. Il faisait trois mètres de haut. Le répondeur Ansafone a été inventé en 1960 par Kazuo Hashimoto pour Phonetel, d'abord écoulé aux Etats-Unis. Le trust Casio a créé le dispositif de réponse téléphonique moderne de l’industrie (TAD), modèle 400. En 1971, ce modèle « phone mate » est commercialement viable, il peut recevoir 20 messages sur une bande-bobine et un écouteur permet de récupérer les messages privés. Kazuo Haschimoto refait parler de lui en 1983 avec sa mise au point du Digital TAD (Telephone Answering Devices)
Le « pionnier » de la Voicemail (le « père » de la messagerie vocale) est Gordon Matthews. La nécessité d'une messagerie vocale n’est apparue que vers la fin du XXe siècle. Dans les années 1970 et au début des années 1980, le coût d'un appel téléphonique avait diminué et les communications d'affaires par téléphone avaient explosé La rentabilité du travail aussi et le capital ne pouvait pas se permettre de démultiplier le nombre de téléphonistes comme nous gardons en mémoire ces vastes salles des années 1930 avec des centaines d’employées pendues au téléphone par rangées entières et entassées. La croissance vertigineuse des clients de la « société de consommation » ne permettait plus à une ou deux secrétaires de gérer des milliers d’appels en temps réel, des appels en plus qui étaient souvent perdus (pendant l’heure du déjeuner ou au moment des pauses des employés). L’invention de la messagerie vocale obéit alors tout simplement à l’adage capitaliste « time is money » et non pas au mensonger « nous sommes à votre service 24 heures sur 24 » ! Les premières solutions ne permettaient pas de satisfaire la demande, la messagerie e-mail et les téléphones cellulaires n’existaient pas encore ; ils ne se généralisèrent que dans les années 1970 et 80. La messagerie vocale n'a vraiment commencé à se développer qu’à partir du milieu des années 1990. La solution initiale au problème de la communication par téléphone pour les entreprises avait été le centre de messagerie, service de réponse manuelle composée de quelques standardistes répondant de façon harassante à tout le monde ; souvent, la ligne principale étant occupée, il était impossible de joindre l’entreprise une journée entière (cf. « Monsieur, EDF est nul, j’ai passé toute la journée à essayer de vous joindre au téléphone et personne ne m’a répondu, vous en avez de la chance de détenir le monopole, avec le privé on serait plus libre ! »). Les malheureux préposés au téléphone filiaire d’époque et au standard crapoteux ne disposaient que de peu de temps pour offrir des réponses satisfaisantes. Le Capital a réagi donc par l’intronisation généralisée de la messagerie vocale qui a, pour lui, le double avantage : de supprimer des emplois et de se passer de fournir des réponses longues (time is money) ; à ERDF et à France Télécom, les employés sont à la fois « écoutés » en permanence mais aussi « chronométrés » sur le temps de réponse.

La polémique n’est pas close sur qui a inventé la messagerie vocale, il reste impossible de prouver qui fût le premier, dans la mesure où l’idée germa en même temps chez plusieurs « développeurs ». Malgré une mise en application interne réussie, ces deux sociétés ne réussirent pas à commercialiser l’invention.
L’inventeur le plus probable, dans la mesure seulement où il a su faire décoller commercialement l’invention de « Voicemail » serait Scott A.Jones. Scott est âgé de 25 ans en 1986 lorsqu’il affirme avoir inventé la première messagerie vocale efficace et dont tout le monde va avoir besoin. La même année, ce découvreur avisé, fonde immédiatement son entreprise la Boston Technology Inc. Il tombe bien au cœur du démarrage de la dérèglementation universelle du capitalisme en crise, avec la cession de AT & T, Bell Atlantic et autres "Baby Bells" qui ont vu l’intérêt d’approcher les inventeurs potentiels d’une messagerie vocale vraiment efficiente et rentable Plusieurs petits inventeurs avaient déjà déposés des demandes de brevet pour une technologie vocale capable de gérer l'ensemble des régions métropolitaines ; Scott les a tous doublés Il a énergiquement promis à Bell Atlantic de livrer en trois mois ce qui aurait pris des années avec ses concurrents, et au moment où les concurrents de Bell Atlantic . Le groupe technologique de Boston avec Scott a emporté la mise avec un système plus évolutif, plus fiable, plus conviviable (qu’ils disaient…). Or, c’est une règle de la marche en avant débridée du capitalisme que Marx avait déjà identifiée au milieu du XIXe siècle, chaque nouvelle invention de la « civilisation capitaliste » finit par se retourner contre elle. Ainsi en est-il de cette abominable machinerie vocale qui finit par être contre-productive, génère stress et suicide, et participe de la déshumanisation accélérée des rapports sociaux.

Je vais terminer par une note d’humour car seul l’humour nous sauve toujours de la bureaucratie totalitaire des machineries capitalistes. Voici ce que j’ai trouvé sur un blog en anglais et dont j’ai refait la traduction.

ICI L’ENFER, TAPEZ SUR ETOILE POUR ENTRER

« Je ne nie aucunement l’utilité de la messagerie vocale. Je l’ai toujours détestée mais jamais autant que récemment. Je souhaite, pour l'inventeur de la messagerie vocale, un traitement spécial pour l'éternité. Il sera à jamais voué à entendre :
Je vous remercie de votre appel. Vous appel est important pour nous. Afin d'accélérer votre évasion de l'enfer, s'il vous plaît, écoutez attentivement les options suivantes :
- Pour sortir de l'enfer, s'il vous plaît appuyez sur le 1 maintenant.
Vous avez choisi de quitter l'enfer. Pour sortir de l'enfer en français, veuillez appuyer sur le 1 maintenant.
Désolé nous n'avons pas pu identifier votre réponse. Veuillez appuyer sur 1 pour continuer à quitter l'Enfer.
(musique de Jeux interdits)
Si vous souhaitez quitter l'enfer, veuillez appuyer sur 1 ou 2, sinon appuyez sur dièse pour d'autres options.
- Vous avez choisi de quitter l'enfer. Veuillez appuyer sur 1 pour obtenir la documentation avec laquelle vous devriez rester dans l'enfer de la douleur éternelle ou appuyez sur 2 pour continuer.
Êtes-vous sûr de vouloir quitter l'enfer? Appuyez sur 1 pour Oui et 2 pour non»
Vous avez choisi de quitter l'enfer. Veuillez rester en ligne pendant que nous vous vous connectons au démon disponible suivant.
Nous sommes désolés, tous les démons sont actuellement en train de tourmenter d'autres malades. S'il vous plaît appuyez sur 1 pour continuer votre agonie en enfer, ou restez indéfiniment sur la ligne pour le démon disponible suivant.
(musique du fameux solo de Santana)
Nous sommes désolés pour votre attente interminable. S'il vous plaît appuyez sur 1 pour rester en enfer, 2 pour continuer à attendre dans l'angoisse ou 9 pour raccrocher et écourter votre agonie.
(marche funèbre de Chopin)
Je vous remercie de votre appel. Vous appel est important pour nous. Afin d'accélérer votre évasion de l'enfer, s'il vous plaît, veuillez écouter attentivement les options suivantes…
Until Hell freezes over (Jusqu'à ce que l'enfer gèle)


PS : Le site du médiateur de la République est conçu de la même manière autiste et imbécile que n’importe quelle messagerie vocale et strictement encadré par les formulaires déjà cuits et recuits par les technocrates qui épaulent Jean-Paul Delevoye. Citation :

« Pour toute question ou remarque relative au fonctionnement du site internet (ATTENTION toute saisine du Médiateur envoyée à cette adresse ne sera pas prise en compte, merci d'utiliser le formulaire prévu à cet effet ci dessus ) »

lundi 26 juillet 2010

CORRESPONDANCE INSTRUCTIVE



Un nouveau parti communiste – le Paranoïaque Complet (en bloc de béton friable) – et les résidus décroissants de l’anarchisme herbivore

Lettre de province.
Camarade Jean-Louis,

Bien reçu ton dernier ouvrage « Le pervers narcissique ». J’ai apprécié ta critique fort lucide et objective du groupe bordiguiste lyonnais et de leur organe de presse « Le Prolétaire ». Malgré tous les ridicules de ces redites de secte groupusculaire d’adressant d’ores et déjà d’avance à un petit nombre de convaincus infimes et donc au rayonnement quasi nul, j’estime que ces derniers avec l’actuel CCI sont seuls dans le vrai actuellement. Notre but et objectif est de pouvoir reconstruire un parti communiste mondial de classe et de masse et de nous consacrer ainsi à la reconstruction d’une sixième internationale ouvrière (…) Que penses-tu de la revue marseillaise « Le programme de la révolution communiste » ; croire comme eux que le salut communiste mondial viendra des Etats-Unis, cœur de l’impérialisme et de l’argent-roi et cette prétention à vouloir régir l’ensemble des activités de la planète est une lourde erreur. Que penses-tu du journal « La décroissance », qui révèle une révolte anticonsumériste antiproductiviste et anticapitaliste ? Je me retrouve en harmonie avec leurs projets de société anticonsumériste et anticapitaliste, vu mon école de formation anarcho-syndicaliste (j’ai été à l’ORA dans les années 70, à la Gauche Prolétarienne et à l’UTCL). Hélas les « décroissants » ne seront jamais susceptibles que d’attirer des marginaux non-conformistes, quelque peu paumés, exclus des actuels circuits productifs (…) Je te joins comme d’habitude quelques numéros du « Monde libertaire », organe de la FA, conçu pour un lectorat séculier un peu vieillot et figé dans les concepts et les thèmes et les dogmes des grands ancêtres.
A te lire prochainement,
Jean-Pierre

MA REPONSE
Cher camarade Jean-Pierre,

Tu m’envoies tant de choses et aussi beaucoup de questions. Je vais m’efforcer de répondre aux principales, plutôt brièvement. Merci encore vraiment pour toute cette documentation.
Concernant CCI et PCI je suis OK avec tes remarques, c’est à peu près, malgré les critiques qu’on peut leur porter, les seuls à ne pas être débiles.
Le GCM (groupe communiste marseillais) n’est qu’un cercle de gentils fous, à faire pleurer de rire avec leur programme khmer rouge, et ce n’est même pas une secte mais trois ou quatre idiots. Je livre ici pour les lecteurs du blog un mini bêtisier (mais chaque page contient des âneries khmers rouges ubuesques voire simplement hitléro-staliniennes) ponctué d’une phraséologie policière néo-sarkozienne :
- « Excitation de la haine de classe et exaltation de la passion de destruction » (p.11)
- Le parti dirige l’insurrection armée : « offensives fulgurantes de la garde rouge, des sections d’assaut du parti (SA ?), prise d’assaut du siège du pouvoir militaire (Pentagone)… Guerre civile, une guerre sans limites » (chapitre l’insurrection, où ces gros lycéens révèlent qu’ils ont trop joué à Star war à l’ordi).
- Sous la « déclaration de principes » on lit en pouffant : « La dictature du prolétariat c’est l’activité étatique totalitaire du parti communiste mondial pour la réalisation du programme communiste » (p.16)
- Le nouveau tout puissant PC (Paranoïaque Complet) sera plus invincible que les CIA et KGB : « Liquidation des conspiration réactionnaires au moyen d’une police secrète dotée des techniques les plus modernes » (p.19)
- Le Paranoïaque Complet officiera aussi dans les rizières de lozère avec des arguments convaincants : « Conversion des prisons en lieu de répression et de coercition (bis repetita) de toutes les oppositions à la révolution » ; « ouverture de camp de travail pour tous ceux qui ne représentent pas un danger immédiat mais hésitent à soutenir la dictature du prolétariat » ; « transformation de leur hésitation ou neutralité coupable en participation forcée aux travaux d’intérêts révolutionnaires » (p.19).
- En hommage à Koba Staline le Paranoïaque Complet édicte le principe d’acier suivant : « Sélection des cadres et formation des officiers communistes de l’armée rouge » ; « Développement de l’art de la guerre de classe » (les artistes ces petits bourgeois chevelus seront rasé et intégrés dans l’armée rouge)
- Pour écarter tout ouvrier fainéant ou petit bourgeois tire au flanc, militarisation du travail (en hommage au grand ministre Léon Trotsky) : « Conduite des opérations militaro-industrielles pour la poursuite de la production et la maintenance des moyens militaires » (p.23)
- Enfin pour liquider la loi de la valeur capitaliste plus question de copuler à tire larigot : « Planification des naissances et régulation de l’augmentation des membres de l’espèce, adaptation de la procréation aux capacités appréciées (par les dignitaires du parti ? JLR) et aux besoins régénérées d’une société féconde » (pasteurisée).
- Et enfin, presqu’enfin : « Ruine de la civilisation, destruction des villes et de leurs excroissances, les bidonvilles » (p.28) ; il faut vous dire que cette destruction revendiquée par ces trois fous et deux demeurés aurait été en partie faire par leur terrible guerre mondiale sous la direction des dignitaires du parti (l’état-major de l’armée rouge avec sa tchéka avec GPS et Ipad) avec les bombardements intensifs de l’armée rouge sur des pays entiers.

Dans la même mouvance marginale et sectaire, si les gamins du GCM ont abusé des jeux violents sur internet ou de la moquette, une poignée d’anarchistes herbivores honnit les jeux électroniques et préfère jouer à la toupie en bois (bio) et au yoyo même en plastique industriel. Ces ludiques anarchistes (en nombre) décroissants, ne suscitent même pas le quart de l’engouement passéiste des « Gueule ouverte » et autres « Hara-Kiri » du siècle passé. C’est du remplissage navrant à longueur de colonnes de leur benêt papyrus titré « La décroissance » et sous-titré « le journal de la joie de vivre ». Les "casseurs de pub" ne se cachent point être de petits vieux rigolos irresponsables, et sont fins prêts à être jetés dans les goulags de nos khmers rouges du GCM (Paranoïaque Complet). Pas franchement différent pourtant dans le fond, cette variété d’anars artisanaux réactionnaires est à ranger dans les élucubrations talibanesques soft (à la Bitot = portables, TV et ipod à la benne) ; ils se revendiquent des premiers écolos apolitiques et sont les morpions contestataires de l’écologie verte officielle, autant dire qu'ils ne cassent pas des briques. Ils peuvent à juste raison critiquer l’imbécillité des gadgets technologiques mais cela ne suffit pas à faire un programme – tout n’est pas à jeter dans le capitalisme et sans le nucléaire par exemple on serait dans une belle merde industrielle (le pétrole arabe ou vénézuelien ne suffirait pas à nous chauffer en hiver ni à faire avancer les trains). Ces pauvres zigotos comment feraient-ils pour alimenter leur guitare électrique (à bas les ipod mais vive les vieux gadgets…), car on en trouve un dans le dernier numéro d’été pour cracher sur les portables mais pour emporter sa guitare électrique (laquelle fonctionne pourtant avec de l’électricité nucléaire). Le ton n’est nullement audacieux mais sent le vieux hippie rance, marginal. Nos anticonsuméristes et antiproductivistes n’ont aucun projet de société alternative crédible, ce sont des péquenots marinant dans une resucée des vieilles théories herbivores anarchistes.

Le parti Paranoïaque Complet (bloc en béton friable) et les décroissants hippies ne sont pas bien dangereux pour l’ordre dominant. Il y a tant de sectes dans ce monde finissant qu’on n’a pas envie de perdre son temps à les dénombrer. Par cette réponse, cher camarade Jean-Pierre, je ne m’engageais pas à te faire la leçon car ton courrier révèle ton indifférence pour ces petits rigolos (et que tu possédais la réponse) mais je visais simplement à informer ponctuellement mes chers lecteurs de ce blog.

vendredi 23 juillet 2010

LA LITTERATURE ECULEE D’UNE SOCIETE FINISSANTE




AMOUR AMOUR

Par Octave Mirbeau (1925)

A part quelques rares exceptions, peu encouragées d’ailleurs, la littérature ne s’élève guère dans la région supérieure des idées, des connaissances expérimentales et des hautes spéculations psychiques. Elle demeure, immuablement, à l’état de divertissement public. Son rôle social est d’amuser les oisifs et les passants, de faire rêver les femmes ; elle ne l’entend pas autrement. Si, parfois elle tente une incursion timide dans le domaine intellectuel, la critique, chargée de veiller au maintien du bon ordre littéraire, pousse des cris d’alarme. Il lui faut de l’amour. Et le public qui lit et qui achète, répète avec la critique : « Il me faut de l’amour ».
Alors que la science s’efforce de désembroussailler les sources de la vie de toutes les erreurs métaphysiques qui les cachent, mornes ronces, à notre raison ; alors qu’elle conquiert des mondes inexplorés, qu’elle interroge l’infini de l’espace et l’éternité de la matière ; alors qu’elle va, cherchant au fond des mers primitives, la matière primordiale d’où nous sortons et qu’elle suit son long développement à travers les millions d’années et les millions de formes, jusqu’à son évolution la plus parfaite, l’homme ; la littérature, elle, en est encore à vagir de pauvres chansons sur deux ou trois sentiments artificiels et conventionnels qui devraient cependant être bien épuisés, depuis le temps qu’ils servent à nous amuser, car il paraît qu’ils nous amusent.
Elle n’a tiré aucun profit, pour son rajeunissement, des modes magnifiques et nouveaux d’éducation que la science lui apporte, ni des beautés esthétiques nouvelles qui en peuvent surgir. Avec une obstination invincible, elle se refuse à entrer avec elle, ouvert à toutes les activités mentales et artistes de l’homme. Et elle s’acharne à l’amour, c'est-à-dire à l’unique et palpitante question des avoir si Jean épousera Jeanne, et si Pierrette trompera Pierre, et de quelle façon et vice versa. Il lui faut de l’amour.
Là-dessus tous les littérateurs sont d’accord, naturalistes, idéalistes, véristes, modernistes et psychologues. Des œuvres comme Germinal où Zola nous montre le terrible et étrange fantôme de la question sociale, sont rares. Elles sont rares aussi, celles qui, comme l’Anna Karénine, de Tolstoï et le Mal du siècle de Nordau, remuent les idées profondes et projettent de puissantes lumières sur l’avenir de l’humanité. Et l’on a bien vite faite de revenir aux alcôves adultères où l’amour bêle sa complainte éternelle.
Quand on y réfléchit une minute, il arrive une chose incroyable et folle. Dans le guignol littéraire, les personnages de roman n’expriment et ne possèdent qu’une préoccupation : aimer. Ils aiment depuis la première page jusqu’à la dernière, et lorsqu’ils ont fini d’aimer dans un livre, ils recommencent dans un autre. C’est à croire qu’ils ont une anatomie spéciale et inachevée, car, avec une facilité étonnante, ils suppriment tous les autres besoins de la vie physique, une particulière structure crânienne, car, d’un trait de plume, ils biffent toutes les manifestations de la vie intellectuelle, peu différents de ces crétins des Alpes, à l’occiput aplati, au cerveau dépourvu de circonvolutions et de matière grise, à qui, dans la nuit de leur animalité inférieure, il ne reste de vivant et de fonctionnant que l’instinct sexuel.
L’amour a du bon. On lui doit, dans la jeunesse, des heures d’illusion charmante, des croyances vite déçues, et des douleurs aussi, rarement fécondes. De plus il invite l’homme à des actes anormaux, les uns tragiques, les autres comiques, tous ou presque tous d’une démence significative, dont l’étude est intéressante mais trop encombrée. Enfin, il continue l’espèce, malgré lui. L’amour est à la fois délicieux, extravagant, déshonorant, abêtissant, criminel et reproducteur. Il est donc juste qu’il ait dans la littérature la place importante qu’il occupe dans la vie. Mais dans la vie, il n’y a pas que l’amour. Oserai-je dire qu’il y a beaucoup d’autres choses, sans qu’il y paraisse ?
M. Francis Magnard demandait, l’autre jour, que, après l’histoire éternelle, éternellement contée de notre cœur, quelqu’un voulût bien se décider à écrire enfin l’histoire de notre cerveau. Voilà un organe bien négligé. Pourtant ce serait un beau livre à faire, et les matériaux ne manquent pas. « Le monde est étroit, dit Schiller, le cerveau est vaste ». Et Huschke s’écrie : « Le cerveau est le temple de ce qui nous intéresse le plus au monde. Oui, la destinée du genre humain est étroitement liées aux 65 ou 70 pousses de la masse cérébrale, et l’histoire de l’humanité s’y trouve inscrite, comme dans un grand livre plein de hiéroglyphes ». Il y a peu de chances, pourtant, qu’un tel livre soit tenté, de longtemps, dans la littérature, du moins. Les raisons en sont nombreuses et excellentes, en dehors de l’incurable ignorance dont sont atteints les littérateurs modernes. D’abord le sujet manquerait de cette gaieté saine et de cette émotion cordiale, tant recommandées par les critiques qui tournent leurs pouces sur le nombril de M. Renan ; et le livre qui risquerait pareille aventure risquerait fort de ne pas se vendre. Or les livres ne sont faits que pour être vendus ; et l’amour seul se vend chez les éditeurs, aussi bien que sur les trottoirs. La littérature est un commerce comme un autre, plus exigeant qu’un autre, en ce sens qu’il se meut dans un cercle de production étroit et restreint aux choses de l’amour. Les littérateurs sont bien forcés d’en vendre. Ils en vendent en boîte, en sac, en flacon, en bouteille. Ils en vendent de frais, de conservé, de mariné, de fumé. L’étonnant est qu’après en avoir tant vendu, ils en aient encore à vendre, sous quelque forme que ce soit.
Stuart Mill, qui n’était pas un fantaisiste, en sa qualité de logicien, mais qui aimait la musique, comme la seule consolation aux angoisses morales qui l’assaillirent durant une période critique de sa vie, faillit devenir fou, à la pensée soudaine que les accords musicaux pouvaient s’épuiser. « L’octave, écrit-il dans ses Mémoires, se compose de tons et de demi-tons, qui ne peuvent former qu’un seul nombre de combinaisons dont quelques unes seulement sont belles. La plupart ont déjà été inventées ? Il pourrait donc arriver que l’humanité ne vît plus naître un second Mozart ». Cette crainte l’amena au seuil du suicide.
Nous n’avons pas à redouter une catastrophe semblable en ce qui concerne l’amour. Les tons et demi-tons de son octave ont depuis longtemps épuisé leurs combinaisons ; et l’humanité voit, tous les jours, naître des romanciers qui recommencent sans jamais nous fatiguer, les combinaisons littéraires de leurs aînés. D’ailleurs, il ferait beau voir qu’ils voulussent imposer au public une autre marchandise dont celui-ci n’aurait ni l’habitude, ni l’emploi. Nous avons déjà assisté à une révolution terrible et qui faillit mal tourner pour les littérateurs. Autrefois, l’amour était, dans les œuvres dites d’imagination, l’exclusif privilège des hautes classes. Il fallait être au moins baron ou vicomtesse pour avoir droit à l’amour des romanciers. Qu’une blanchisseuse par exemple, et un menuisier pussent s’aimer, cela ne se concevait pas. On savait bien qu’ils faisaient des enfants, mais c’était sans doute, un effet du hasard et non un résultat de l’amour.
Quelques écrivains hardis et brutaux, rompant tout à coup avec la tradition des amours élégantes et titrées, imaginèrent d’introduire dans leurs romans des blanchisseuses, des menuisiers et de les faire s’aimer comme s’ils étaient des marquises et des ducs. C’était une prétention insoutenable et malhonnête. Aussi le scandale fut-il énorme. On protesta au nom du bon goût, de la morale et de la vérité. Les critiques décidèrent que c’était la fin du monde. Mais les écrivains novateurs tinrent bon. Ils déclarèrent en de mémorables préfaces, où il était question de déterminisme, d’enquête sociale, de sciences naturelles, que non seulement ils continueraient à faire s’aimer menuisiers et blanchisseuses, mais qui on leur cherchait noise, ils les « feraient penser ». Devant cette menace, le scandale s’apaisa peu à peu, et l’on se dit, après tout, que si improbable que fut l’amour d’une blanchisseuse, c’était encore de l’amour, et que cela valait mieux que rien.
Aujourd’hui les critiques ont fini de lutter. Ils acceptent le mouvement, c’est-à-dire qu’ils s’en désintéressent d’une façon absolue, qu’ils ne s’occupent plus que de dîner en ville et de se pousser les uns les autres aux honneurs et aux succès. M. Jules Lemaître célèbre M. Anatole France ; M. Anatole France célèbre Jules Lemaître, et, dans la Revue des Deux-Mondes, le tendre M. Brunetière , parlant de Voltaire et de M. Faguet, nous montre un tout petit Voltaire et un très grand Faguet. Il va sans dire que M. Faguet rend à M. Brunetière sa politesse. Cela n’en finit plus et nous vaut des volumes presque aussi nombreux que le roman d’amour où l’on voit, non sans émotion, les critiques se tresser de réciproques couronnes et parler de leur génie, avec de touchantes piétés. Entre temps, ils renaissent. Il est vrai qu’ils tolèrent encore à côté d’eux trois écrivains non point à cause de leur talent indiscuté et de la beauté de leurs œuvres, mais parce que les deux premiers sont priés chaque jour, à des tables recherchées, et que le troisième est marin. Cela les étonne et ils admirent.
Tel est l’état actuel de la littérature. Il n’y a pas d’indice pour qu’il change de longtemps. Nous sommes encore condamnés à de longs adultères et à d’innombrables « Dis-moi que tu m’aimes ». Et la plume qui doit écrire le livre rêvé par M. Magnard, le livre qui contiendrait l’histoire contemporaine et toute neuve de nos idées, et non plus l’éternel recommencement de nos sentimentalités vieillottes, n’est pas près d’être forgée.
Pourtant le moment serait favorable à l’éclosion d’une telle œuvre. Nous sommes à une période historique, et probablement à la veille de grandes transformations. Il n’est pas besoin d’être un esprit profond pour comprendre que des événements se préparent, plus considérables qu’aucun de ceux qui se sont accomplis dans le passé. Les multiples découvertes de la science, le résultat des enquêtes biologique, anthropologique, astronomique, qui restituent à la matière les phénomènes que nous avons l’habitude d’attribuer à une force supra-naturelle, leur application au bien-être de l’humanité rendent l’heure que nous vivons particulièrement troublante. Les institutions politique, économique et sociale, toutes d’oppression et de mensonge, qui régissent les peuples ne correspondent plus à nos besoins ni aux idées qui éveillent en nous un rêve de justice, de liberté et de bonheur.
Nous oscillons entre un passé auquel nous ne croyons plus et un avenir encore incertain et mal défini qui nous effraie et nous attire en même temps ? Il en résulte un malaise général qui se traduit chez les uns par la résistance décuplée aux dépossessions fatales, chez les autres par l’impatience de précipiter le mouvement vers des formes de vie plus rationnelles, plus scientifiques.
En réalité nous ne sommes qu’au seuil de la civilisation. Si nous comparons la durée relativement courte du développement de la civilisation à celle des temps préhistoriques ; si, comme le remarque le grand Buchner, nous observons qu’une portion restreinte du globe se prépare à ce développement ; si nous songeons que la vitesse du progrès s’accroit au fur et à mesure de sa continuité ; si nous ne perdons pas de vue qu’au milieu de notre vie raffinée, subsistent encore, en nombre considérable, les impulsions et les instincts grossiers de notre passé barbare, et que le struggle for life, dont le caractère sauvage s’est transmis des animaux à nous, fait rage, toujours, parmi les hommes ; alors nous reconnaitrons que nous sommes à l’aurore de la civilisation et que nous n’avons parcouru qu’une petite partie du chemin de lumière ouvert devant nous. Nous nous croyons des décadents et nous ne sommes qu’une façon de sauvages. Un savant russe, le professeur W. Betz, je crois, en étudiant ce qu’il faut de fibres nerveuses et de cellules nerveuses pour l’élaboration d’une idée, a trouvé, dans le cerveau humain, une quantité prodigieuse de places vides, de steppes immenses peu utilisées, qui attendent pour se remplir et se fertiliser, l’ondée bienfaisante du Progrès et de l’Evolution.
Si la littérature est restée en arrière des sciences, dans la marche ascensionnelle vers la conquête de l’idée, c’est que, plus avide de succès immédiats et d’argent, elle a davantage incarné les préjugés, les routines, les vices, l’ignorance du public qui veut qu’on le berce avec des histoires de l’autre monde.

PS : Mirbeau est un écrivain considérable, toujours négligé en France. En Juin 1968, à Amsterdam, au milieu des fumées hallucinogènes de la faune hippie dans le vaste dancing Paradiso, un étonnant jeune hollandais me fît connaître cet auteur français, me confiant sa grande admiration et son projet de poursuivre son œuvre. Qu’est-il devenu ? En Hollande, Mirbeau est notoirement connu et apprécié. Il eût même pour lecteur un certain Pannekoek. Wikipédia fournit une très intéressante et complète biographie du grand Octave Mirebau. Ce grand démystificateur avait senti venir la révolution russe mais hélas est mort l’année de son surgissement.

mardi 20 juillet 2010

L’ETAT-RENTIER ET SES BOURGEOIS EN VIAGER


« Dans le même temps qu’on cessait en Angleterre de brûler les sorcières, on commença à y pendre les falsificateurs de billets de banque. Il faut avoir parcouru les écrits de ce temps-là, ceux de Bolingbroke, par exemple, pour comprendre tout l’effet que produisit sur les contemporains l’apparition soudaine de cette engeance de bancocrates, financiers, rentiers, courtiers, agents de change, brasseurs d’affaires et loups-cerviers ».
Marx (Les dettes publiques dans la genèse du capitaliste industriel)

« La bourgeoisie (...) a noyé les frissons sacrés de l'extase religieuse, de l'enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité à quatre sous dans les eaux glacées du calcul égoïste. »
(Manifeste du Parti Communiste, 1848).


LA SOURCE DU PROFIT MODERNE

Lorsque le capitaliste vend la marchandise produite dans son entreprise, la plus-value apparaît comme un excédent, un surplus aux coûts de production capitalistes. En déterminant la rentabilité de l’entreprise, le capitaliste confronte cet excédent avec le capital avancé, c’est-à-dire avec la totalité du capital investi dans la production. La plus-value, rapportée à la totalité du capital, prend la forme du profit. Comme la plus-value est comparée non pas au capital variable, mais à tout le capital dans son ensemble, la différence s’efface entre le capital constant, dépensé pour l’achat des moyens de production, et le capital variable dépensé pour l’embauchage de la force de travail. Il en résulte l’apparence trompeuse que le profit est le fruit du capital. Cependant, en réalité, la source du profit est la plus-value créée uniquement par le travail des ouvriers, uniquement par la force de travail dont la valeur est incarnée dans le capital variable. Le profit est la plus-value considérée dans son rapport à la totalité du capital investi dans la production ; elle apparaît, extérieurement, comme le fruit de ce capital. En raison de cette particularité, Marx appelle le profit une forme modifiée de la plus-value.
De même que la forme du salaire masque l’exploitation de l’ouvrier salarié, en faisant croire que tout le travail est payé, de même la forme du profit camoufle à son tour le rapport d’exploitation, en créant l’apparence trompeuse que le profit serait engendré par le capital lui-même. Ainsi les formes des rapports de production capitalistes estompent et masquent leur véritable nature. Les capitalistes s’efforcent, en exploitant au maximum les ouvriers, de freiner la baisse tendancielle du taux de profit. Cela aboutit à aggraver les contradictions entre prolétariat et bourgeoisie.

La loi de la baisse tendancielle du taux de profit accentue la lutte au sein de la bourgeoisie elle-même pour la répartition de la masse globale des profits. Dans leur course aux profits élevés les capitalistes dirigent leurs capitaux vers les pays retardataires, où la main-d’œuvre est meilleur marché et la composition organique du capital plus basse que dans les pays à industrie hautement développée, et ils jettent à la rue et suppriment la retraite des prolétaires des pays les plus puissants. Ensuite, pour maintenir paralysées les masses jetées au chômage ils chargent leurs délégués politiques de corrompre les syndicats et abondent en millions les caisses des différents partis officiel.
Enfin, soucieux de compenser la baisse du taux de profit en augmentant sa masse, les capitalistes élargissent le volume de la production au-delà des limites de la demande solvable. De ce fait, les contradictions résultant de la baisse tendancielle du taux de profit, se manifestent de façon particulièrement aiguë pendant les crises, tout comme la corruption généralisée du système démocratique ne peut plus être masquée. La loi de la baisse tendancielle du taux de profit est un des indices les plus frappants des limites historiques du mode de production capitaliste, comme les révélations sur la corruption généralisée à tous les échelons de l’Etat est l’indice de la pourriture avérée et masochiste de la classe déliquescente de plus en plus contrainte à frauder pour compenser sa perte de crédibilité face aux masses appauvries. Le régime bourgeois devient un obstacle à la paix sociale, un encouragement à la violence et à l’émeute. Il reste relativement protégé du lien de cause à effet par l’utilisation médiatique contestataire des journalistes corrompus et jaloux et par la bêtise anti-marxiste des dernières sectes d’extrême-gauche comme Lutte Ouvrière où grand-mère Arlette engage à « préparer le 14 juillet des travailleurs », après un titre pleine page « Gouvernement et milieux d’affaire : Une politique au service des riches ! ». La lutte des classes n’est plus selon le populisme trotskien qu’une lutte « contre les riches »… en les dépossédant à la manière stalinienne ! Et avec ce langage retors très électoraliste qui oublie tous les autres parasites de l’Etat rentier (les commerçants, les fonctionnaires syndicaux, les magistrats, les flics, etc.). On lit ceci dans l’édito du 19 juillet : « les seuls inutiles dans cette société, ce sont les grands bourgeois », et le résumé des révélations perçues par les activistes trotskiens : «Une sordide affaire de très gros sous, dans la famille de la femme la plus riche de France, a mis en lumière les relations qui existent entre les membres de la grande bourgeoisie et les hommes politiques à leur service. Et peu importe que tout se soit passé en toute légalité, comme le proclament les porte-parole du gouvernement, ou que Éric Woerth et Sarkozy aient pris quelques libertés avec celle-ci. De toute manière, ce qui ressort clairement de cette affaire, c’est que tous les politiciens qui se présentent comme les défenseurs de “l’intérêt général” sont au service exclusif des possédants. La preuve en est que les services des impôts n’ont pas le moindre droit de regard sur les revenus publics ou cachés des plus grosses fortunes ». L’allusion à un bon Etat stalinien qui contrôlerait mieux les grosses fortunes qui termine la description ne rassure pas plus que la charge contre les politiciens, de gauche en particulier pour lesquels la secte LO a toujours appelé à voter, oubliant de nous rappeler que l’idéologie diffusée par « l’intérêt général » est une marmelade d’antiracisme et d’antifascisme de salon, cette confiture politique ayant servie de formation de base à la ribambelle d’ex-leaders étudiants reconvertis en élus frauduleux, ou en avocat dans l’affaire Bettencourt (celui de la secrétaire bavarde).

DEFINITION DE L’ETAT RENTIER

Avant de revenir sur la superficialité des scandales qui agitent les médias français, il nous faut expliquer cette notion qui disqualifie l’Etat bourgeois actuel qui n’est ni universel, ni progressiste, ni libre-échangiste mais l’Etat d’une vieille classe inhumaine, rétrograde et bouffonne. Tout le génie de Lénine nous y aide. Dans « L’impérialisme, stade suprême du capitalisme, écrit prémonitoire il y a un siècle voici comment il décrivait déjà « le parasitisme et la putréfaction du capitalisme » :
« L’impérialisme est une immense accumulation de capital-argent dans un petit nombre de pays, accumulation qui atteint, comme on l’a vu, 100 à 150 milliards de francs en titres. D’où le développement extraordinaire de la classe ou, plus exactement, de la couche des rentiers, c’est-à-dire des gens qui vivent de la « tonte des coupons », qui sont tout à fait à l’écart de la participation à une entreprise quelconque et dont la profession est l’oisiveté. L’exportation des capitaux, une des bases économiques essentielles de l’impérialisme, accroît encore l’isolement complet de la couche des rentiers par rapport à la production, et donne un cachet de parasitisme à l’ensemble du pays vivant de l’exploitation du travail de quelques pays et colonies d’outre-mer. (…) Aussi la notion d’« Etat-rentier » (Rentnerstaat) ou Etat-usurier devient-elle d’un emploi courant dans la littérature économique traitant de l’impérialisme. L’univers est divisé en une poignée d’Etats-usuriers et une immense majorité d’Etats-débiteurs. "Parmi les placements de capitaux à l’étranger, écrit Schulze-Gaevernitz, viennent au premier rang les investissements dans les pays politiquement dépendants ou alliés : l’Angleterre prête à l’Egypte, au Japon, à la Chine, à l’Amérique du Sud. En cas de besoin, sa marine de guerre joue le rôle d’huissier. La puissance politique de l’Angleterre la préserve de la révolte de ses débiteurs. (…) "L’Angleterre, écrit Schulze-Gaevernitz, se transforme peu à peu d’Etat industriel en Etat-créditeur. Malgré l’accroissement absolu de la production et de l’exportation industrielle, on voit augmenter l’importance relative qu’ont pour l’ensemble de l’économie nationale les revenus provenant des intérêts et des dividendes, des émissions, commissions et spéculation. A mon avis, c’est précisément ce fait qui constitue la base économique de l’essor impérialiste. Le créditeur est plus solidement lié au débiteur que le vendeur à l’acheteur. "(…) En ce qui concerne l’Allemagne, l’éditeur de la revue berlinoise Die Bank, A. Lansburgh, écrivait en 1911 dans un article intitulé : « L’Allemagne, Etat-rentier » : "On se moque volontiers, en Allemagne, de la tendance qu’ont les Français à se faire rentiers. Mais on oublie qu’en ce qui concerne la bourgeoisie, la situation en Allemagne devient de plus en plus analogue à celle de la France. "
L’Etat-rentier est un Etat du capitalisme parasitaire, pourrissant ; et ce fait ne peut manquer d’influer sur les conditions sociales et politiques du pays en général, et sur les deux tendances essentielles du mouvement ouvrier en particulier ».

BIEN MAL ACQUIS NE PROFITE JAMAIS…

Pour sûr l’enrichissement dans l’histoire de l’humanité n’a jamais été honnête ni un don des cieux, ni une conséquence de l’Etat-rentier. L’enrichissement de la famille Bettencourt ne remonte pas à la nuit des temps, mais il est bien symbolique du niveau de corruption atteint par le capitalisme décadent. La famille Schueller-Bettencourt s’est enrichie durant la guerre. Elle ne fût pas la seule, les bourgeoisies anglaise et américaine ont tout dévalisé... L’Oréal est à notre époque la première fortune de France et un des fleurons industriels de la France éternellement enfumée par les parfums politiques nauséabonds. On s’est donc sans scrupules royalement enrichi pendant le deuxième carnage impérialiste mondial. Le père de la multi-milliardaire, Eugène Schueller, a contribué à créer le CSAR (Comité Secret d’Action Révolutionnaire) plus connu sous le joli nom de « Cagoule », groupuscule d’extrême droite, dans les jupes du nazisme. Le mari disparu, André Bettencourt – obligé de tous les cocktails présidentiels depuis la Libération - a dirigé la revue « La terre française », ouvrage pour le moins pétainiste et antisémite. Puis, par opportunisme gaulliste, il s’inscrira dans la Résistance, à partir de 1944, l’année du débarquement. Comme le disait un autre tonton du pouvoir, Mitterrand (durant une petite année salarié de L’Oréal en tant que président-directeur général des éditions du Rond-Point et directeur du magazine Votre Beauté): " En politique, il n’est jamais trop tard".

ET LA VIEILLE DAME MILLIARDAIRE SE FAIT POURTANT DEPOUILLER

Nous serions autrement attristés qu’il arrivât une telle mésaventure à une dame âgée, partie en retraite à un âge acceptable, dépouillée de ses maigres économies par un voyou de passage. Dans l’affaire de la vieille dame, hors de toute proportion comptable, et personne ne l’a remarqué jusqu’à présent, le voyou semble bien être l’Etat-rentier, avec ses trois dimensions : voyou, gendarme et magistrat !
Partie d’une simple plainte de sa fille déshéritée, le casse étatique de la fortune Bettencourt s’est croisé avec celui d’aigrefins privés qui baratinent Mme Bettencourt depuis qu’elle est veuve. C’est fragile une veuve riche. Elle a tout avoué… posséder des comptes à l’étranger et toute une île aux Seychelles non déclarés au fisc. Elle avait promis de régulariser cette situation. Malheureusement, une affaire qui restait jusque là du domaine de l’escroquerie dans le domaine privé a rebondi aussi comme escroquerie (consentante ?) en faveur du parti au pouvoir et de l’actuel président ; puis enfin parce qu’on a découvert que la femme de l’actuel ministre du sale boulot (E.Woerth) avait été discrètement pistonnée pour devenir la gestionnaire de la principale poule aux œufs d’or. Le ministre a nié sans pouvoir cacher que le service mutuel est de règle depuis deux siècles au moins dans les rangs bourgeois : tu trouves un bon job à ma femme et je te file la légion d’honneur ! Patrice de Maistre a même été haussé au grade de Chevalier ! Woeth a été jusqu’ici le petit colporteur pour la récolte des fonds auprès des grosses fortunes, et cela nous a valu des quolibets journalistiques entre les uns et les autres pour savoir qui avait été à la soupe chez la mère Bettencourt.
Dans les enregistrements clandestins de conversations apparus mi-juin - que le parquet (affidé Courroye) a refusé de transmettre à la juge qui enquête sur un abus de faiblesse aux dépens de la milliardaire – un des parasites déclarait au contraire à Liliane Bettencourt avoir embauché Florence Woerth à la demande de son mari, «pour lui faire plaisir». Quelques mois plus tard, en janvier 2008, Patrice de Maistre recevait la Légion d'honneur des mains d'Eric Woerth. Le vague écrivain et photographe François-Marie Banier a décroché en 2002 «un contrat de 405.000 euros par an pendant 10 ans», qui prévoit de le rémunérer pour des «conseils de mode et de sensibilité artistique» et d'organiser une grande exposition par an des oeuvres de l'intéressé. La fille, Françoise Bettencourt-Meyers estime ainsi que ce photographe des stars se serait fait remettre près d'un milliard d'euros de dons - notamment en contrats d'assurance-vie, chèques, tableaux de maîtres - dans les années 1990 et 2000, en profitant de la fragilité psychologique de l'octogénaire. Une thèse fermement démentie par l'intéressé, qui assure que ces cadeaux lui ont été consentis par une «femme brillante et libre» (j’ai fait pour ce paragraphe le copier-coller lécheux du journaliste soucieux de ne pas se faire mettre en examen). Chaque épisode vient confirmer qu’aussi haut que vous soyez placé dans l’échelle sociale, isolé(e) vous pouvez vous faire plumer comme n’importe quel retraité impotent. Sorti de sa GAV, l’ex-avocat fiscaliste (drôle de profession) de la milliardaire s’est apparemment complètement fichu de la gueule des policiers. Me Fabrice Goguel, qui préside la fondation pour l'équilibre écologique, esthétique et humain, qui est officiellement propriétaire de l'île d'Arros. Il confie au Figaro comment il est facile de tricher : « Il y a quelques années, le propriétaire de l’île d’Arros (Mme Liliane Bettencourt, NDLR) a souhaité assurer la préservation écologique et esthétique de cet écosystème unique après son décès. Il voulait ainsi éviter que l’on ne se mette à y construire un hôtel avec 200 chambres pour y développer un tourisme de masse. À sa demande, j’ai examiné les différentes possibilités et je me suis rendu compte qu’il est beaucoup plus simple de créer une fondation au Liechtenstein qu’en France, où il faut demander le feu vert du Conseil d’État. Cette structure a été fondée en décembre 2006 et il est vraisemblable qu’elle intégrera à l’avenir plusieurs scientifiques au sein du conseil de fondation. D’ores et déjà, des recherches scientifiques sont conduites sur l’île d’Arros, notamment sur les tortues de mer, et elles devraient s’amplifier à l’avenir ».
Dans le même temps où on apprenait que pour financer les gros partis il suffit de créer plus de deux cents micros partis pour aller taper à la porte des grands bourgeois ou racketter des industriels, on découvre qu’il suffit de baiser le fisc et les gendarmes en prétextant créer une structure « écologique » pour la recherche scientifique sur les tortues de mer, pas sur les baleines ? Que pense notre célèbre Paul le Poulpe du fait que la dame Bettencourt se retrouve en viager au profit d’avocats recyclés chercheurs ! Mais l’héritier ne sera pas forcément celui qu’on pense, un héritier peut en cacher un autre. Si l'on se fie aux auditions réalisées la semaine dernière dans l'affaire Bettencourt, ajoute un journaliste, le doute n'est plus permis : l'île d'Arros, aux Seychelles, appartient bien aux Bettencourt. Et elle devrait effectivement revenir à l'artiste François-Marie Banier, désigné comme bénéficiaire, au même titre, cependant, que trois associations médicales : Orvacs, Solthis et Crepats, toutes trois fondées par le couple de professeurs de médecine Gilles Brücker – exécuteur testamentaire de Liliane Bettencourt – et Christine Katlama. Il y a du monde pour une île.
Peu intéressée par la misérable situation de la vieille dame, la gauche bourgeoise et ses journalistes, une partie de la droite masquée crient au scandale politique simplement pour la partie qui concerne les dons à la droite mais pour la galerie, et puis sur ce plan au moins la dame était libre de faire ce que bon lui semblait. Je reste plus choqué par la manipulation de la vieille dame et son détroussement par les aigrefins, quoique je me fiche que la famille hérite, que par le financement des valets politiques de la haute bourgeoisie au pouvoir.
Le problème n’est toujours pas l’existence de la corruption en général, des scandales financiers, des affaires mais celle du capitalisme qui les engendre. Il y a eu dans le passé des scandales, il y a aujourd’hui des scandales et il y aura dans l’avenir d’autres scandales tant que ce système existe. Les deux dernières phrases sont également prononcées par trotskiens et résidus staliniens dans la plupart de leurs blogs, mais ils font croire qu’il s’agirait d’un combat contre les riches et qu’une meilleure démocratie serait possible sur la base des élections républicaines, pacifiquement. Des menteurs peuvent dire parfois le vrai, mais toujours partiellement, ce qui est forcément une moitié de leur mensonge politique.

IL N’Y A PAS QU’EN France…

La gauche et l’extrême gauche restent limités aux scandales français. Comme en France Mme Bettencourt, des artistes d'Hollywood sont aussi rackettés par les officines politiques parallèles ou l'Eglise de Scientologie. Les scandales financiers de ces dix dernières années nous ont permis de nous rendre compte de l’ampleur d’une créativité frauduleuse des grands groupes internationaux en matière de comptabilité, supérieure à celle des financements des partis politiques bourgeois nationaux. La liste des entreprises pointées du doigt pour leurs maquillages comptables est longue mais deux d’entre elles se sont distinguées particulièrement : Enron Corporation aux Etats-Unis et Vivendi-Universal en France. Enron était la 7ème capitalisation boursière des Etats-Unis et Vivendi-Universal le 2ème groupe mondial de communication. Elles se sont distinguées par le fait qu’elles se sont détournées de leur métier initial, la distribution de gaz pour Enron et la distribution d’eau pour Vivendi, vers des métiers dits d’avenir, le courtage en énergie pour Enron et la communication pour Vivendi. Enfin, leurs nouveaux métiers permettaient une plus grande opacité des pratiques comptables et particulièrement dans le cas d’Enron puisqu’il s’agissait d’un métier qui n’existait pas.

Les liens entre l’argent des grandes industries et la désignation du personnel politique sont un secret de polichinelle dans tous les pays. En 1979, arrivant au pouvoir au Royaume-Uni, Margareth Thatcher, était déjà une roturière membre notoire de la Royal Society britannique et du Conseil privé de la reine mais également du think tank ultra-conservateur Heritage Foundation, qui fut un des architectes et des soutiens les plus importants de la doctrine Reagan en Afghanistan, en Angola, au Cambodge ou au Nicaragua. Or, Thatcher n'était qu’une autre soubrette politique longue série de dirigeants corrompus et dévoués aux intérêts aveugles de l'élite (Sarkozy pour l’oligarchie-énarchie française). En dehors de leur avidité pour leur enrichissement personnel, ces délégués politiques de la bourgeoisie n’ont pour souci que la pérennité du système d’exploitation et le partage du gâteau entre la classe régnante et la couche supérieure des classes moyennes.

LA CORRUPTION EST FILLE DE LA FINANCE MODERNE

L’Etat-financier, en même temps Etat-prédateur et Etat-rentier n’a plus qu’un jeu de principe :le jeu du gendarme et du voleur dans lequel le gendarme est aussi un voleur et le criminel. Le dernier crime politique a été en Europe et aux Etats-Unis la mise en place sous différentes formes de boucliers fiscaux. En France, il a été instauré par la loi de Finances 2006, abaissant les impôts des contribuables de 60% à 50% de leurs revenus depuis le 1er janvier 2008, sur les revenus de 2007. Le dispositif prend en compte l'ensemble des prélèvements fiscaux : la contribution sociale généralisée ( CSG ), la contribution pour le remboursement de la dette sociale( CRDS), l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), l'impôt sur le revenu, , les taxes foncières et la taxe d'habitation sur la résidence principale. Le système fonctionne par remboursement de l'administration fiscale: si les impôts payés dépassent le seuil de 50% des revenus, celle-ci rembourse l'excédent aux contribuables. Ainsi, l'Etat français rembourse ses membres les plus riches au prétexte qu’ils investissent à nouveau dans l’industrie et favorisent la création d’emplois. Ce qui est archi-faux au vu des sommes faramineuses que se disputent les parasites de la « pauvre » veuve Bettencourt : sommes dispendieuses, rentes royales à des avocats louches, aux politiciens, etc.
En résumé, les boucliers fiscaux, quelle que soit leur forme, répondent à une volonté politique criminogène de limitation de la participation des riches bourgeois au financement du budget de l'Etat, accablant la classe ouvrière et (heureusement) aussi une bonne partie des couches dites moyennes (cet édredon qui protégeait la haute bourgeoisie jusqu’ici) afin que les grands dominants puissent faire fructifier l’argent dans des produits financiers douteux mais bienvenus. En réalité ce narcissisme pervers insatiable de la haute bourgeoisie ressemble vraiment au faste précaire de la noblesse décadente, la politique économique n’est plus qu’une économie politique véreuse qui hausse l’intérêt particulier au rang d’un individualisme féodal.
Le lobbying entre les autorités étatiques (gouvernement et partis de gauche et de droite, syndicats) et les milieux financiers (banques, agences de notation, cartels d’industries, etc.) est un va et vient constant où les premières jouent le rôle d’entremetteurs et sont rétribués individuellement pour ce « service ». La criminalisation de l’économie capitaliste date des années 1990 qui marquent le début d'une nouvelle ère de corruption financière en raison du développement de la titrisation, processus permettant de transformer les crédits en titres échangeables. C'est ce phénomène qui a conduit à l'augmentation du nombre de crédits à risque en circulation dans l'économie, les banques s'incitant mutuellement à accorder le plus de crédits possibles, en considérant que celles qui en émettront le plus seront les plus rentables et donc verront leur cotation boursière améliorée en conséquence. Ce geste de tricherie est le symbole même de l’esprit d’anti-jeu permanent qui anime le football, en tant que composante du capitalisme, comme l’ont confirmé la plupart des matchs de la Coupe du monde en Afrique du Sud. De même que le capitalisme accumule les profits en exploitant les humains et la planète, la finalité du sport capitaliste est de gagner à tout prix, le « jeu » en lui-même n’ayant plus aucune importance. Le gangstérisme légal est devenu la dernière « valeur » du capitalisme.
D’habitude, les scandales financiers et les affaires de corruption qui mettent épisodiquement en cause la plupart des membres d’un gouvernement n’ont aucune influence directe sur la révolte sociale. Pas de pot cette fois-ci, « l’affaire Bettencourt » contraste honteusement avec la politique de rigueur et d’austérité sans précédent que le gouvernement Sarkozy (sponsorisé aux élections en grande partie par la vieille milliardaire) impose au prolétariat (et à cette petite bourgeoisie mécontente d’y tomber). Au moment où l’Etat bourgeois exige au prolétariat des sacrifices de plus en plus lourds – il a quasiment avalisé dans ses corridors la detsruction de la retraite à 60 ans - au moment où les chômeurs et les précaires se comptent par millions, les représentants de la bourgeoisie, eux, se permettent de se servir abondamment dans les caisses de l’État et jouissent d’innombrables privilèges. La liste des ministres impliqués dans des affaires est longue : des 9 500 euros mensuels de Christine Boutin pour une obscure mission sur la mondialisation, aux 12 000 euros des cigares de Christian Blanc en passant par les hôtels particuliers du ministre de l’industrie Christian Estrosi ou les 116 500 euros d’Alain Joyandet pour un aller/retour à la Martinique sans parler de son permis illégal pour agrandir sa maison près de Saint-Tropez. Car les scandales financiers, corruption, privilèges sont intimement liés au fonctionnement même du système capitaliste qui les produit et reproduit de manière permanente depuis un siècle, mais ils tombent mal, et, même s’il s’agit de règlements de compte souterrains entre factions bourgeoises qui se moquent de ce que peuvent en penser les millions de prolétaires.
« Le gouvernement moderne n’est qu’un comité qui gère les affaires communes de la classe bourgeoise tout entière », disait Lénine. L’État n’est donc pas au service de l’humanité, mais sert seulement les intérêts privés de quelques uns. Le président gère l’Etat contre l’intérêt général au profit de l’intérêt particulier, celui de la classe dominante. Et plus il essaie de sauver les intérêts de la haute bourgeoisie, plus la gauche bourgeoise du PCF au PS limite les protestations à un changement de président ou de majorité parlementaire.
La corruption, elle aussi, remplace l’intérêt public par l’intérêt privé. La droite favorise la corruption privée quand la gauche au pouvoir favorise la corruption publique. La droite, après la gauche, avec un sentiment total d’impunité, s’est servie à son tour dans les caisses de l’État comme s’il s’agissait de son propre patrimoine ! Malgré l’appel à la rigueur du sous-fifre Fillon et le fait que le président ait promis de réduire le train de vie des ministères, personne n’est dupe, la corruption étatique est ultra-protégée. Les magistrats sont complices, les syndicalistes aussi. Il n’y a pas conflits d’intérêts entre la bourgeoisie et ses partis politiques, mais une même volonté de discrétion. C’est pourquoi les débats comme celui sur les retraites éloignées se tient, sans scrupules, à huit clos.

En conclusion, je ne peux résister à vous coller ici le superbe commentaire de Philippe Petit de Marianne. Je ne suis pas lecteur de Marianne, magazine franchouillard anti-révolutionnaire limité à des solutions politiques hexagonales et démocratoques, mais quand un passage me plaît, il me plaît de le citer/
« Que l’argent soit la figure du mal. Ce n’est pas une nouveauté ! Il est l’art « d’acheter trois francs ce qui en vaut six et de vendre six francs ce qui en vaut trois », disait Charles Fourier. Il pervertit les relations humaines. Il est la valeur qui inverse toutes les autres selon Shakespeare et Marx. Il nous fait vivre – nous les hommes – dans un monde corrompu où la part du crime grandit, de la fraude, explose. Nous le savons. Mais inversement nous savons aussi qu’un monde où il n’y aurait aucune fraude, aucune corruption, est impensable. Certes, ce n’est pas une raison pour encourager la fraude et la corruption. Mais cela en est une pour ne pas sombrer dans la pure dénonciation de l’argent fou. Pour Marx l’argent : c’est ce qui sépare l’être de l’agir. L’aliénation se définit chez lui concrètement par cette séparation : « Ce que l’homme est par l’argent, il peut cesser de l’être, et, de fait, il s’en sépare concrètement dans ses actes », écrivait-il. Voilà une belle définition de l’argent fou ! L’homme ne sait plus ce qu’il fait, l’argent lui fait perdre la tête. De moyen, l’argent devient fin.
Reste à savoir ce que signifie cette séparation. Elle signifie chez Marx, la perversion des liens humains. De sociable qu’il était, l’homme, gagné par la passion de l’argent, finit par annuler son semblable. Il fallait bien trouver un responsable à un tel dévoiement. Et chez Marx, le responsable, c’est l’argent. Car l’argent, en devenant capital, est précisément ce qui annule le rapport marchand, ou si on préfère, la relation humaine qui préside à ce rapport. Ce qui faisait dire à Hume que « l’argent n’est pas à proprement parler un objet de commerce ». Il y avait le doux commerce, ce qu’on appelle le capitalisme marchand, il y a maintenant le capitalisme sauvage, la spéculation etc. Bizarrement, aujourd’hui, tout le monde est marxiste ! Les vilains financiers, qui appliquent Marx à la lettre. Ils vont au bout de la perversion. Et les gentils dénonciateurs, qui, eux, vont au bout de la dénonciation de cette perversion. Lisez à ce sujet l’entretien avec Henri Guaino dans le numéro de «Cités» sur les capitalismes. Il y a donc le pouvoir de l’argent d’un côté, et de l’autre, la dénonciation de ce pouvoir. De ce cercle, il faudra un jour sortir. « La divinité visible » dont parlait Marx à propos de l’argent est aujourd’hui moins visible, il y a moins d’espèces trébuchantes. Et très souvent l’argent ne se dit pas : il navigue entre la honte, de n’en avoir pas assez, et la culpabilité ou l’arrogance d’en avoir trop. Un tel pathos a son utilité. Mais il ne pourra nous délivrer de cette schizophrénie ».

dimanche 18 juillet 2010

MAUVAIS "CLIMAT JUDICIAIRE" MAIS LA REFORME DES RETRAITES EST DEJA ARROSEE



« Dans les pays de vieille culture parlementaire démocratique, la bourgeoisie a admirablement appris à agir non seulement par la violence, mais aussi par la tromperie, la corruption, la flatterie, jusqu'aux formes les plus raffinées de ces procédés. Ce n'est pas pour rien que les « déjeuners » des « leaders ouvriers » anglais (c'est à dire des commis de la bourgeoisie chargés de duper les ouvriers) sont devenus célèbres et qu'Engels en parlait déjà. La réception «exquise» que fit monsieur Clemenceau au social traître Merrheim, les réceptions aimables faites par les ministres de l'Entente aux chefs de l'Internationale de Berne, etc., etc., relèvent du même ordre d'idées. « Vous, instruisez les, et nous, nous les achèterons », disait une capitaliste anglaise intelligente à monsieur le social impérialiste Hyndman, qui relate dans ses mémoires comment cette dame, plus avisée que tous les chefs de l'Internationale « de Berne » réunis, jugeait les « efforts » des intellectuels socialistes pour instruire les leaders socialistes issus de la classe ouvrière ».
Lénine (Les tâches de la IIIe Internationale)

vendredi 16 juillet 2010

L’argent de la vieille et le VRP de l’Elysée


Prolétaires en vacances, éteignez la télé, laissez de côté les intox des infos, reposez-vous, distrayez-vous. L’épopée triste à mourir de cette pauvre milliardaire diminuée - flouée de tous côtés, dévalisée par ses larbins et son photographe parasite, ponctionnée par tous les partis français de gauche et de droite, de Lellouche à Mitterrand – nous fait pitié. Nous, le prolétariat opprimé et méprisé qu’est-ce qu’on se fiche des conflits d’intérêts, ces embrouilles des profiteurs ministres dont on ne sait jamais les aboutissants ! Qu’est-ce qu’on se fiche des histoires d’évasion fiscale ! Même notre redresseur de tort James Bond, alias Sean Connery, a été mis en examen ! Plus personne en qui avoir confiance, ni espion anti-communiste, ni espion communiste ! Les agités du bonnet électeurs de la gauche caviar ou des bobos verts qui s’agitent sur les blogs et les post, criant à l’injustice, vomissant leur haine contre le « nain Sarko » font tout sauf de la politique, éructent des litanies pathologiques de jaloux et Martine Aubry est minable.

DES SCANDALES PARTOUT QUI N’EMPECHENT PAS LA BOURGEOISIE DE GOUVERNER

La gauche bourgeoise, qui ne veut surtout pas du pouvoir en ce moment (dixit la patate chaude des retraites) fait bruisser partout que le gouvernement Sarkozy pourrait sauter « grâce aux scandales » et plein de petits chiens blogueurs aboient contre cette « ordure » de Sarkozy.
Sarkozy tomber ? Remplacé par qui ? Personne ne lève le doigt actuellement en France. On crie, on s’agite mais il n’y a aucune proposition alternative. Les syndicats sont très sages, c’est pourquoi l’hyperprésident les a remerciés lors de sa conférence en tête à tête avec le journaliste le plus petit de France.
Alors levons le nez vers ailleurs.
Un exemple vient à l'esprit, celui de l'Italie, où le sentiment « antipolitique » et les imprécations contre « la caste » politicienne continue de dominer plus d'une décennie après que le scandale « Tangentopoli » - autrement plus sérieux - a emporté les grands partis politiques traditionnels. Berlusconi règne sans partage.
Rappelez-vous les scandales au début de l’année dernière en Angleterre. L'onde de choc du scandale des notes de frais des députés britanniques n'en finissait pas d'ébranler Westminster.
Le salaire officiel des députés aux Communes est fixé à 64 766 livres par an, un montant comparable à celui des autres grands pays démocratiques. Cette somme confortable est néanmoins inférieure à la rémunération de certains hauts fonctionnaires ou cadres supérieurs. Plutôt que d'augmenter ce salaire - une décision toujours délicate vis-à-vis de l'électorat - un système complémentaire a été discrètement mis en place dans les années 1980 pour permettre le remboursement des frais professionnels. Ce tour de passe-passe a permis d'aligner la rémunération globale sur des fonctions de rang et de prestige équivalents dans les secteurs public et privé. La principale astuce a consisté à rembourser les frais relatifs au maintien d'une résidence secondaire dans la circonscription d'élection. En pratique, les députés étaient allés plus loin et ont souvent traité les possibilités de remboursement comme un véritable complément de salaire. L'utilisation de l'ensemble de l'enveloppe leur permettait d'élever leur rémunération globale à 104 000 livres par mois avant impôts. Ce secret de polichinelle, largement accepté par la classe politique au-delà des clivages partisans, s'est transformé en bombe à retardement avec l'entrée en vigueur du « Freedom of Information Act », une loi votée par les travaillistes pour permettre un plus large accès des citoyens aux documents administratifs. Résultat : l'électeur peut prendre connaissance des factures remboursées et s'informer ainsi du train de vie de son député et de la part qu'il fait supporter à la collectivité. Le quotidien conservateur Daily Telegraph a ainsi pu distiller petit à petit le détail des notes de frais individuelles. Ces révélations vont de l'explosif - double facturation, plus-values immobilières, voire fraude fiscale - à l'anecdotique - frais de bouche, rénovation de salles de bain, chauffeurs mobilisés pour se rendre à des matches de football - en passant par le grotesque - la palme étant de ce point de vue remportée par les locations de films pornographiques visionnés par le propre mari de la ministre de l'intérieur.
Le discrédit de l’oligarchie bourgeoise vite surmonté. Au-delà même de l'examen des cas individuels, c'est toute la collectivité des parlementaires qui est apparue discréditée. Celle-ci a violé l'esprit et parfois le contenu des règles qu'elle s'était elle-même fixée. Tout le problème réside précisément dans l'ambiguïté fondamentale du système - de jure un simple remboursement des frais personnels engagés localement et plus ou moins liés à l'exercice des fonctions officielles, de facto un véritable complément de salaire dont beaucoup disposaient à leur guise. La colère des électeurs blogueurs, en pleine récession, s'est exprimée avec une violence plus violente qu’en France face à l’affaire Bettencourt. Hués par le public sur les plateaux de télévision, traités de « menteurs » et de « voleurs » sur les marchés du dimanche, les hommes politiques étaient soumis à la vindicte populaire. Partout fût souligné l'écart entre la rémunération des parlementaires et le salaire médian des Britanniques (25 100 livres annuels). Aggravé par le désamour vis-à-vis du New Labour au pouvoir, ce climat général a conduit à montrer du doigt les hommes politiques comme une caste de profiteurs. Comme en France à l’heure actuelle le bipartisme droite/gauche hurla au danger du triomphe des partis populistes et du xénophobe BNP. Gordon Brown, à cause aussi d’un mépris trop affiché pour une « vieille électrice », y a perdu sa place de Premier ministre, pas de quoi fouetter un chat. La bourgeoisie britannique reste exemplaire et la plus subtile du monde. Cameron a succédé au grossier Gordon Brown, avec cette manière bien particulière de l’oligarchie britannique de rejouer perpétuellement un simulacre de lutte des classes sur la scène politique.

LA FRANCE EST TOUJOURS UN CAS PARTICULIERD’une certaine façon, c’est un même type de scandale qui frappe en France, mais il est beaucoup moins grave car il ne touche qu’un ministre et personne, dans les basses classes, n’est horrifié par le financement louche et généreux des partis bourgeois dominants. Les parlementaires sont relativement épargnés et la gauche n’est pas au pouvoir. On peut présumer que les scandales britanniques ont servi à virer le parti travailliste inapte en temps de crise à jouer vraiment les durs de l’intérêt national. En France, l’UMP fait très bien le « sale boulot » laissant les caciques du parti caviar chanter l’Internationale et défiler le 1er mai. Il n’y a pas vraiment d’inquiétude pour le pouvoir qui ne suivra pas les injonctions du rigolo esseulé Julien Dray qui en appelle à la dissolution du parle-ment.

Dans l’ensemble, l’affaire Bettencourt en France pose trop de questions pour l’instant pour qu’il soit possible d’y voir clair, un peu comme au moment de l’affaire Cleartream où rien n’a été élucidé. Il est évident qu’il s’agit de « conflits d’intérêts » politiques parmi les fractions bourgeoises. Il est aussi évident que les autres fractions (des gaullistes derrière Villepin au PS) ne tiennent pas à faire tomber le gouvernement Sarkozy qui se tape trop bien le « sale boulot » (la réforme des retraites, véritable scandale contre la classe ouvrière). On peut présumer qu’il s’agit d’une bagarre pour un meilleur partage du gâteau en vue d’un jeu de chaises musicales (cf. la leçon de conduite que veulent donner à l’hyperprésident Sarkozy par les Juppé, Raffarin et Villepin).

A côté des histoires de conflits d’intérêts et de détournement de l’argent de la vieille riche (3ème fortune de France) les éclaboussures ont un aspect positif : elles remettent sur la table que les élections démocratiques sont totalement truquées par l’argent : les partis politiques dominants doivent être généreusement financés de toutes les manières possibles pour se partager le pouvoir. Sarkozy a été élu tout simplement parce qu’il a touché le plus gros magot ; mais cela tout le monde le savait. Cela devrait suffire à accroitre le nombre d’abstentionnistes chez les ouvriers (69% la dernière fois !). Mesurant en permanence le danger de perte de crédibilité totale de la mystification parlementaire, les divers clans de la bourgeoisie font chacun appel à la morale, et la morale est : attention de ne pas favoriser le FN ! Le corrompu Julien Dray, désormais minus au PS, vieux complice de Mitterrand, se hasarde à prédire que la corruption trop exhibée ouvrirait la porte à la revanche sociale en septembre. Quel plaisantin ! Les scandales financiers n’opèrent pratiquement pas sur la levée de la révolte sociale. Ce n’est pas le collier de la reine qui a entrainé la révolution française mais la faim au ventre.

GOUVERNER PAR LES SCANDALES ET 280 PARTIS

Malgré une prestation passable de l’hyperprésident lundi 12 juillet pour promettre une République irréprochable avec un plaidoyer contre l’argent « malsain » (il est blanc comme son Woerth) personne ne doute que le gouvernement a organisé les «fuites» dans les journaux des procès-verbaux d’audition qui lui étaient favorables. Commission d’enquête sur mesure avec juge acheté comme Courroye, le gouvernement n’est pas déstabilisé. En faisant inculper les aigrefins qui entourent la pauvre milliardaire il a botté en touche plaçant les scandales au niveau du fait divers. La maison Bettencourt (L’Oréal pétainiste) est une source ininterrompue de pognon pour alimenter tout le monde. Si ce n’était que l’UMP qui avait été financé, mais tous les leaders des autres de Kouchner à Lellouche ont été dîner à la table des Bettencourt (on ne nous a encore rien confirmé pour les bonzes Thibault et Chérèque)
Sont arrosés des partis politiques inconnus, souvent dédiés à une seule personne, ne comptant dans la plupart des cas qu’une poignée - voire pas du tout - d’adhérents. Les « fuites » ont mis en lumière des microformations, dont la désormais célèbre Association de soutien à l’action d’Eric Woerth, destinataire d’un chèque de 7 500 euros signé par l’héritière de l’Oréal. Mais le parti du ministre du Travail, localisé dans l’Oise, est loin d’être un cas unique : nombre de ministres ou de députés ont leur propre structure. C’est le cas de Benoist Apparu, secrétaire d’Etat au Logement, qui vient de donner naissance à l’Association de soutien à l’action de Benoist Apparu, mais aussi de Valérie Pécresse (Changer, c’est possible), Rama Yade (Agir pour Colombes), Laurent Wauquiez (Nouvel Oxygène), Christian Estrosi (Alliance Alpes-Méditerranée) ou encore François Fillon (France 9). Chez les députés, Franck Riester, ex-directeur de la campagne UMP des régionales, ou Jean-François Lamour, ex-ministre des Sports, ont fait de même. Une inflation qui explique que la France compte désormais quelque 280 partis. Cette floraison de formations croupions qui remonte à quelques années s’accompagne de quelques suspicions. Dont celle de Daniel Lebègue, président de l’ONG Transparency : «Ces micropartis qui n’existent pas réellement, avec un nom différent du parti auquel ils appartiennent, sont contraires à la loi. C’est un moyen de contourner les règles du financement privé.» Pour limiter le financement privé de la vie politique (et les risques de collusion afférents), la loi plafonne à 7 500 euros par an les dons des personnes physiques à une organisation. En revanche, rien n’empêche un donateur généreux de multiplier les dons en les adressant à plusieurs partis satellites. L’affaire Bettencourt en a donné une illustration. Les écoutes du majordome ont révélé que l’héritière de l’Oréal avait signé en mars quatre chèques en faveur de l’UMP : un pour l’association de financement du parti, deux pour Valérie Pécresse et un pour Eric Woerth. En 2007, dans le cadre de la présidentielle, l’UMP avait pu compter sur l’association de soutien de Nicolas Sarkozy, parti dont le seul objet était de recueillir des dons en «parallèle» avant de les faire remonter vers l’association de financement de la campagne (lire ci-dessus).
La France a montré son ridicule (commercial/culturel/industriel) au niveau international avec une équipe de football minable, individualiste, avec des comportements de voyous riches tout à fait à l’image des patrons/voyous, des chefs de service pervers narcissique de F.Telecom qui poussent au suicide des prolétaires pressurés. Lors de sa prestation télévisée sur mesure, le chef de l’Etat a versé une larme sur la « souffrance » en France et pour confirmer sa compassion il nous a dit qu’il en est désormais le « chef d’équipe ». Cela nous consolera peut-être de savoir qu’un marchand de tapis a remplacé le charbonnier Domench. En tout cas notre VRP a été incapable de répondre à la question la plus percutante de Pujadas : « entre 55 ans et 62 ans, ils ne trouvent plus de boulot ».
La réponse la voici : en effet, et c’est pourquoi on ne va plus leur offrir une pré-retraite mais les pousser à la rue, sans ressources ! ET çà, pour nous les millions de prolétaires c’est beaucoup plus grave que la façon dont ils se pillent des sommes astronomiques entre eux.
Beaucoup plus grave, oui.

samedi 10 juillet 2010

CE QUE JE DIRAIS A LA PLACE DU ROTURIER SARKOZY LUNDI sur FRANCE 2


Par Paul le Poulpe, la nouvelle voyante universelle

Presque toujours en politique le résultat est contraire à la prévision.
François-René de Chateaubriand



Jamais scandale n’a été si scandaleux et si révélateur: les riches à poil sont laids et bêtes ! Jamais les dentelles en soie et les dentiers en or des vieux bourgeois n’ont été ainsi exhibés au bon peuple ! Quelle aubaine crie l’oligarchie de la gauche caviar ! Quelle aubaine hurle le site gauchiste Rue 89 ! Quelle chance pour les chiffres de vente de nos études bourdieusiennes sur la haute société, s’exclame le couple Pinçon-Charlot ! Guerre au palais, paix aux chaumières chante le chétif Besancenot, voile (noir) autour du cou !La mayonnaise avariée de toute cette agitation mortifère n'aurait certainement pas pris si nos bleus n'avaient pas perdu aussi piteusement. Ressaissez-vous, nous connaitrons d'autres victoires ensemble.
Certes mon Woerth de poche est maire du château de Chantilly. Certes sa mémère a l’air con avec ce large chapeau emprunté aux dames de forte corpulence noble. Certes elle fût jusqu’à récemment la tabatière de la plus riche rombière de France et de Navarre. Certes mon petit Woerth a toujours été une cheville ouvrière de la circulation mafieuse de l’argent pour les cliques de droite. Et alors ? Vous croyez que le PS c’était mieux avec l’affaire Urba et le PCF avec l’argent de Moscou ?
Et d’abord, est-ce que ma justice en robe noire et chapeaux rigolos a porté plainte, comme disait l’autre jour mon ami le sondologue Reynié ? Non, alors la ferme ! Est-ce que Charles Pasqua s’est plaint que j’ai remplacé mes juges par un panel de sénateurs et de députés amis qui l’ont blanchi ? Non, alors la ferme !

Vous savez chers concitoyens qui est le plus ridicule dans cette histoire de scandales qui ne fait que débiter des évidences séculaires qui ne vous empêchent nullement de suivre les derniers matchs de la coupe du monde de foutball ? Eh bien je vais vous le dire : les journalistes bobos. La plupart n’ont pas la classe de mes amis Val et Pujadas bien sûr. Ces journalistes investigateurs sont en réalité tous aigris que je ne les ai point promis à la direction de mes chaînes de radio et de télé. Voilà pourquoi ils vont nous chercher des poux chez nos bons riches sans qui l’ouvrier n’aurait point de travail. Mes chiens de porte-parole ont en vain aboyé contre ce site de merde Médiapart cornaqué par un louche ancien trotskien à moustache stalinienne. J’ai été bien gentil de retenir la laisse de mon principal pitt bull Lefebvre car il était parti pour le dévorer.
Vous voyez, chers compatriotes de quel degré de maîtrise il a fallu que je m’empare pour éviter les débordements de mes chiens, et ma magnanimité princière, pardon démocratique. Mon lapsus soudain n’est, je dois vous le dire, aucunement une concession à la théorie des gauchistes bourdieusiens sur une soi-disante « noblesse d’Etat ». Les mannes du Général De Gaulle me pardonneront mon excès de langage, ce n’est qu’une connerie de plumitifs, hélas trois fois hélas ! Cette charge contre la minorité dirigeante oligarchique – je sais 69% des ouvriers n’ont pas voté aux dernières élections – est typique des couches intellectuelles petites bourgeoises qui votent massivement pour le PS et son concurrent nain les Verts. La dénonciation des riches ne risque pas plus de faire tomber mon gouvernement que l’insurrection potache des amis jeteurs de cailloux du petit Julien Coupat. Ce n’est pas dans mes habitudes de citer un ennemi ancestral, je dois vous le dire, mais je vous le dis. Il dit un jour que le véritable ennemi du prolétariat n’est pas représenté par l’infime minorité des riches possédants mais par cette masse immense de petits bourgeois intéressés à la conservation du système capitaliste et nullement disposés à « tomber dans le prolétariat ». Cet homme lucide se nommait Wladimir Ilitch Lénine et mourut au siècle dernier à l’âge de 54 ans.

Le danger représenté par ce scandale d’argent « sale » - hi hi vous pensiez que l’argent était « propre » ? – n’est pas intrinsèque à nos magouilles habituelles et bien connues même du bon prolétariat. Il est dans la tentative faite par tous ces scribouillards de faire capoter ma volonté comme honorable délégué de la classe dominante, je tiens à la préciser – vous pensez bien que s’il n’y avait pas eu la crise, j’aurais préféré garder au chaud mes millions de retraités peinards, serviles électeurs – de supprimer progressivement cette vieillerie républicaine de retraite. Quoi de choquant que mon ministre du travail soit un simple secrétaire de la principale fortune de France et que sa femme en nettoie les écuries ? Pinay était palefrenier. Pompidou cireur de pompe chez Rotschild. Giscard portier à la banque de France et Sapin forestier chez M. le duc.
N’oubliez pas que mes principaux collaborateurs, Chébault et Thirèque, n’ont pas jugé utile de se mêler à cette horrible chasse à l’homme – et croyez bien que je sais de quoi je parle car, entre nous dans notre ghetto d’ultra-riche, nous pratiquons la chasse à courre mais après un vulgaire animal. Ces syndicats sont tout de même les représentants de l’immense majorité silence des travailleurs.
Comme vous le voyez mes assises sont solides concernant ladite rentrée. Vous ne croyez pas d’une part que les salariés roulés dans la farine par tant d’enterrements syndicaux de rue vous être nombreux à défiler derrière mes serviteurs à qui j’interdis simplement d’appeler à voter pour moi officiellement ; et d’autre part vous ne croyez pas qu’il y a une solution alternative, chez mes partenaires de la couche inférieure de la gauche caviar, pour solutionner les graves déficits par lesquels notre pays est meurtri.

Chers compatriotes, je vous dois la vérité. Cette réforme je la conduirai à terme et aucun des coyotes qui aboient ne pourra se mettre en travers. Je vais vous dire pourquoi. Nous ne réformons pas la retraite en général. Nous nous attaquons surtout à la retraite des plus démunis du secteur privé. La revendication salariale comme facteur d’unification de la lutte contre l’Etat bourgeois a toujours été du pipeau marxiste. Vous n’imaginez pas que les régimes spéciaux maintenus, comme celui de la SNCF, vont bouger le petit doigt pour les pauvres prolongés du privé ! Z’avez qu’à s’embaucher dans un service public quand ils avaient 20 ans… et puis le privé a été longtemps mieux rémunéré que le public, n’est-ce pas. C’est pourquoi j’ai, dès le début de mon mandat, révolutionné les conditions de travail pour tous afin de permettre à la sélection naturelle des meilleurs de travailler plus pour gagner plus ; pensez à ces grands patrons qui n’ont pas d’heure ni de retraite ! Quant à cette partie des couches moyennes boutiquière, artisans et commerçants, ils ne prennent pratiquement jamais leur retraite, et pour cause, ou lors de leur dernière heure. Et je peux ajouter que je n’ai fait que légaliser une pratique courante, partout dans le monde les retraités s’emmerdent tellement qu’on les trouve partout prêts même à travailler gratuitement pour des associations transhumanitaires… J’aimerai donc qu’on cesse de me karchériser ainsi que de jeter des tomates sur mes ministres, nous ne sommes que les modestes délégués de la classe dominante.
L’augmentation de la durée d’emploi des enseignants, qui va-t-elle choquer ? A part les concernés et encore, les profs d’université ont si peu d’heures qu’ils en redemandent. N’ont-ils pas trois mois de vacances par an ces feignants d’électeurs des monarques socialistes ?

Non, voyez-vous, chers compatriotes, ce que je crains le plus derrière toute cette abracandantesque agitation, comme aurait dit mon prédécesseur les grand feignant, c’est que la vieille bourgeoisie bourdieusienne, avec ses moyens formidables pour corrompre la presse, de Médiapart à FR3, n’en ai marre de notre ascension à nous les néolibéraux roturiers. Elle avait accepté pourtant au début mon langage de charretier, mes discours de bateleur de foire rédigés à la va vite par mon plumier Gaino. Possible qu’elle manigance mon éviction en estimant que je ne serais plus ni cohérent ni efficace pour empêcher un nouveau 68 ou 95. En terminant ce discours, je tiens donc à m’adresser à elle, par-dessus vos têtes ignares, et dans l’intérêt de notre nation.
Chers compatriotes fort respectables d’héritiers récipiendaires de la longue tradition du pillard et tueur Clovis, du nain Napoléon, du puant Clemenceau, des rigolos de la IVème République, et des incontinents De Gaulle et Mitterrand, prenez garde à ne pas trop jouer avec le feu. Il risque de nous roussir tous. Quelle alternative à mon gouvernement de réformes ? Je vous le demande. Qu’est-ce qu’on fait si les ouvriers débordent les syndicats en octobre ? Croyez-vous que le PS et Cohn Bendit ont les moyens de faire rêver les foules prolétariennes ? Non, franchement vous n’y pensez pas !
Enfin, pour conclure cette adresse au peuple français, je me tourne vers vous tous, mes compatriotes prolétariens, chômeurs, immigrés et sans papiers : aidez-moi à rester au pouvoir contre les riches manipulateurs pervers !Parce que je le vaux bien moâ!