"La suppression de la propriété privée... suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».
Marx (L'idéologie allemande)

«Devant le déchaînement du mal, les hommes, ne sachant que devenir,
cessèrent de respecter la loi divine ou humaine. »

Thucydide

mercredi 15 mai 2024

LE DRAPEAU ET LA REVENDICATION PLUS LA DECOMPOSITION (deuxième partie)

 

Le charme peu discret de l'aristocratie syndicale
DE L'ARISTOCRATIE OUVRIERE A L'ARISTOCRATIE CORPORATIVE ET SYNDICALE

« Les hommes ont toujours été et seront toujours en politique les dupes naïves des autres et d’eux-mêmes, tant qu’ils n’auront pas appris, derrière les phrases, les déclarations, les promesses sociales, politiques, religieuses, morales, à découvrir les intérêts de telles ou telles classes. Les partisans de réformes et d’améliorations seront toujours mystifiés par les défenseurs du vieil état des choses, tant qu’ils n’auront pas compris que toute vieille institution, si barbare et si pourrie qu’elle semble, se maintient grâce aux forces de telles ou telles classes dominantes ». Lénine (« Les trois sources et les trois parties constitutives du marxisme », p. 202. (1913).
« Dans la droite ligne de Marx et Lénine, l’idéologie participe pleinement de la lutte des classes et de l’aliénation. Ainsi, « les politiques ont leurs systèmes de signification, les idéologies, qui leur permettent de subordonner à leurs stratégies les actes et événements influencés par eux. »

Henri Lefebvre (Le droit à la ville, 1974)


« Marx, dans Le Capital, analyse d'abord ce qu'il y a de plus simple, de plus habituel, de fondamental, de plus fréquent, dans les masses et dans la vie quotidienne, ce qui se rencontre à tout instant, les rapports d'échanges commerciaux en régime bourgeois, l'échange de marchandises. Son analyse décèle dans ce phénomène élémentaire ... tous les antagonismes (ou embryons de tous antagonismes) de la société contemporaine » Citation de Lénine par Lefebvre en introduction à son fameux ouvrage « Critique de la vie quotidienne »1

« La bourgeoisie d'une ‘grande’ puissance impérialiste peut, économiquement, soudoyer les couches supérieures de ‘ses’ ouvriers en sacrifiant à cette fin quelque cent ou deux cent millions de francs par an, , car son surprofit s'élève probablement à près d'un milliard ; . Lénine 1916

CLASSE OUVRIERE OU PROLETARIAT ?

Le foisonnant et brillant Henri Lefebvre n'est pas à une contradiction près. D'une part, comme on l'a lu, il nie un quelconque rôle révolutionnaire à la classe ouvrière, mais en même temps il en mesure l'expansion à la majorité de la population mondiale en différenciant classe ouvrière et prolétariat ; chose que nombre de groupes ouvriéristes nièrent à la fin des sixties, de même que R.I. (Révolution Internationale ) avec ce simplisme qu'on va retrouver sur la notion d'aristocratie ouvrière pourtant très marxiste. L'analyse de Lefebvre est par contre intéressante même s'il enferme lui aussi la classe ouvrière dans l'entreprise, à une époque où il est vrai, malgré mai 68, elle était engluée dans la société de consommation plus qu'intéressée par une perspective de révolution contre le capitalisme. Son analyse généraliste, voire surtout interclassiste, dans sa forme, devrait complaire au CCI généraliste, simpliste et radoteur.

L'opinion de Lefebvre estimant une classe ouvrière homogène a par contre été controuvé depuis 50 ans : désindustrialisation, envolée des emplois tertiaires, chômage massif où les prolétaires se sentent isolés et sans solidarité en partie de la part de l'aristocratie ouvrière privilégiée, refus des encravatés des bureaux de se considérer comme prolétaires, diminution du nombre d'ouvriers en bleu de travail, noyade du concept de classe dans la formulation « classes moyennes », progression de l'islam dans l'entreprise, généralisation du salariat précaire, ouvriérisme et wokisme syndical, mouvements de colère populiste comme les gilets jaunes, etc.

« A côté de la classe ouvrière se produit une prolétarisation gigantesque qui résulte de cette vaste décomposition. Avec des éléments conflictuels nouveaux. Si on définit le prolétariat par l'absence de liens juridiques et pratiques avec les moyens de production, la prolétarisation touche le monde entier: prolétarisation des classes moyennes,» des cols blancs, : des paysans ruinés et non intégrés à la production, dans toutes sortes de pays d'Amérique latine par exemple, des périphéries urbaines. Vaste prolétarisation du monde contrastant • avec le bloc de la classe ouvrière qui est là, solide. Plus la jeunesse, plus les intellectuels pour qui la connaissance n'établit pas de liens avec les moyens de production ; plus les noirs, plus les travailleurs immigrés. Enorme prolétarisation correspondant très exactement à la notion marxiste initiale, c'est-à-dire à la notion de classe séparée des moyens de production, chargée de négativité, capable, dans certaines conditions, de la lutte à mort pour tout changer. Et puis, échappant à la dissolution de ces rapports la classe ouvrière certes continuant à vouloir mettre fin à l'exploitation capitaliste, mais en même temps constituant dans le monde actuel, une masse positive, un bloc à peu près homogène malgré les différences de strates. Ce n'est pas son embourgeoisement qui est en question, elle n'est pas embourgeoisée par la consommation ; elle résiste. Mais, dans la dissolution générale,: elle reste un bloc relativement cohérent. Et si elle n'accepte pas la société bourgeoise, c'est la version minimale de la transformation révolutionnaire qu'elle accepte et non la maximale. La classe ouvrière ne suit pas quand on propose de fane sauter la famille ; et pourtant cela fait partie du projet révolutionnaire La lutte de classe en tant que lutte à mort a disparu,- dans nos pays industriels, au moins momentanément, au moins conjoncturellement. On a donc un bloc relativement homogène, résistant à l'exploitation, mais avec des tendances conservatrices qui excluent la version maximale, c'est-, à-dire la transformation radicale de la société »2.

 La division des ouvriers par la diffusion de diverses idées et doctrines bourgeoises qui affaiblissent la lutte de la classe ouvrière.  (Lénine)

Lénine ne limite pas la diffusion des doctrines bourgeoises au seul nationalisme, comme le montre son œuvre immense ou aux illusions de la société de consommation comme le démontre Lefebvre. Lénine ne s'est pas contenté de dénoncer le nationalisme et le trade-unionisme. Il a commis des erreurs d'une part en estimant que la conscience de classe devait être apportée de l'extérieur à la classe ouvrière, puis ensuite en devenant chef d'Etat. Que cela n'empêche pas de juger ses apports théoriques inestimables avant cette stupide prise du pouvoir par un parti qui se disait communiste. Il mène un combat politique qui ne se résume pas à exalter la classe ouvrière de façon religieuse (comme le fait le CCI)3. Il combat les raisonnements mystico-religieux de Berdiaev, selon qui la révolution socialiste prenait un caractère apocalyptique. « La révolution plus que tout autre chose, porte en elle le reflet de l'apocalypse ». Jamais le CCI ne dénonce l'islam en entreprise ni son expansion dans les quartiers ouvriers. L'appel à la religion , par les idéologues « démocratiques » demeure l'obstacle le plus sûr et le plus solide à l'extension des idées de révolution sociale. Analyser les diverses mystifications sociétales, y inclus les dits faits divers n'est pas de la sociologie bourgeoise mais une nécessité politique concrète. Lénine a la courage de s'attaquer aux grands pontes du socialisme de l'époque qui enferment la lutte de classe dans le choix simpliste : réforme ou révolution, comme il combat les mystifications petites bourgeoises de son ami Martov.

QUAND LE MEURTRE N'EST QU'UN ACCIDENT DU TRAVAIL

Voici un exemple de mystification probant du parti populiste de la gauche bourgeoise, LFI (pour ceux qui veulent tomber dans le panneau), par la grosse à queue de cheval Mathilde Panot ; genre de filouterie que le CCI est incapable de décrypter. Elle a profité du drame, l'assassinat des surveillants pénitentiers pour dévier du fond en généralisant dans le vague sociologique concernant « les morts au travail » : «Aucun agent du service public ne devrait mourir dans l’exercice de ses fonctions. Ce sont les 110e morts au travail pour 2024. Soutien aux agents blessés et à leurs proches» (sur X) (ce qui leur fait une belle jambe comme toutes les autres compassions des autres cliques bourgeoises).

Or l'idéologie islamo-gauchiste se fiche en réalité de ces meurtres qui pose plutôt la question de la sécurité policière (= pas question d'être complice de la police étatique), ignorer le type enfui qui s'appelle en plus Mohamed (= pas question de développer le racisme ni de s'aliéner les électeurs arabes), l'opération a été menée par une mafia sans foi ni loi (= laisser à Zemmour la dénonciation de la perte d'autorité de l'Etat) ; car enfin les tueurs ne sont que des victimes de la société capitaliste comme la plupart des prisonniers (qui ont droit à un portable en prison pour éventuellement préparer leur évasion de la prison bourgeoise). Mohamed a déjà un avocat immédiatement invité sur les plateaux TV. Preuve que tout tueur est immédiatement défendable...Une responsable syndicale du sud parle « d'accident du travail) donc ce serait du niveau interne à l'entreprise et ni social ni politique ! Je laisse à mes lecteurs intelligents se représenter la réaction ulcérée d'une grande partie de la classe ouvrière qui aura raison en un sens d'aller voter Bardella en méprisant les clowns bien soumis et les écologogols, protestation formelle plus que confiance en la gestion du parti bourgeois de la droite de la droite(sic). Le CCI se contente d'essentialiser sans analyser les dégâts sur la conscience de classe du déroulé et des interprétations de ces drames. Le mot décomposition lui suffit pour éviter de s'exposer à la morale gauchiste, qui a pour fonction cardinale d'empêcher de penser politique comme nos curés du temps jadis.

La superficialité et le simplisme sont aussi criants concernant la boucherie à Gaza : « les manifestations actuelles ne se situent, ni de près ni de loin, sur le terrain de la classe ouvrière. Elles représentent au contraire un piège mortel pour le prolétariat ! avec des relents d’antisémitisme à peine voilés ». Or on commence par ignorer que les manifestations ont lieu pour l'arrêt du massacre, que c'est mieux que rien (où est le prolétariat en Palestine?). Deux oui sous ce pacifisme partis populistes à la LFI et NPA prennent partie pour le camp du Hamas, mais trois l'antisémitisme de ces paris n'est pas prouvé, une telle accusation provient des souteneurs juifs de Tsahal partout. Les bordiguiens sont plus près de la vérité, même s'ils croient possible une libération nationale palestinienne. Les prolétaires palestiniens sont sous le régime de terreur du Hamas et les prolétaires israéliens on se demande s'il y en a vu que les travaux les plus durs dont effectués par des prolétaires palestiniens à Tel Aviv et que la population juive est derrière son « Etat juif » ; ce que souhaite le CCI dans ce drame relève de l'utopie pour ne pas dire de la connerie4.

Cela nous amène donc au rejet par le CCI de l'analyse marxiste de l'aristocratie ouvrière.

ARISTOCRATIE OUVRIERE une théorie sociologique pour diviser la classe ou une évidente création bourgeoise ?

Depuis deux ou trois ans, la presse du CCI nous bassine avec le même titre : « Seule la classe ouvrière a la solution », car : « Depuis juillet 2022, quelque chose se passe du côté de la classe ouvrière. Les travailleurs ont retrouvé le chemin du combat prolétarien, au niveau international »5.

J'ai démontré dans plusieurs articles antérieurs qu'il s'agit d'une fable ou plutôt d'une auto-persuasion. La plupart sont des grèves hyper corporatives, chauvines et sans véritable généralisation cornaquées par les appareils syndicaux de la bourgeoisie. On est loin de l'exemple polonais de 1980 où effectivement la généralisation avait eu lieu, de la part de toutes les entreprises petites ou grandes et sans enchevêtrement de l'aristocratie ouvrière, en effet car quand le mouvement se développe sa spécificité se dissout. Mais nier son existence hors des luttes est anti-marxiste et prend la bourgeoisie pour une idiote.

LA RETRAITE, COMBIEN DE REGIMES ?

Le plus navrant pour illustrer cette reprise est le recours à la lutte pour « les » retraites en France, présentée comme un nec plus ultra.

« Début 2023, alors que les grèves se multipliaient un peu partout dans le monde, le prolétariat en France s’est à son tour mobilisé massivement contre la réforme des retraites. Des millions de personnes enthousiastes ont manifesté dans la rue avec la ferme volonté de se battre tous ensemble, tous secteurs et toutes générations confondus. Puis, à la rentrée, les ouvriers aux États-Unis ont engagé l’une des plus massives grèves de l’histoire de ce pays, notamment dans le secteur automobile, suivi par un mouvement du secteur public également décrit comme historique au Québec ».

En gros c'est ce qu'on pouvait lire dans n'importe quel tract gauchiste. Or non seulement les appareils syndicaux ont baladé les gens, sans AG, bien cloisonnés et en chansons anti-Macron. « Volonté de se battre ensemble » ? Quoique pas du tout pour les mêmes objectifs...ni les mêmes retraites. La retraite à 60 ans interdite pour tous ? Pas vrai ! Plusieurs « services publics » l'ont conservé, même à 55 ans. Des retraites aussi diverses que les conditions diverses du travail en entreprise. Et excusez-moi du peu, pour une lutte anti-révolutionnaire du genre réformiste : l'espoir de se reposer un peu du capitalisme en fin de vie. Les manifs pour les retraites avant mai 68 tout le monde s'en fichait. Cette comédie de lutte pour une retraite unique pour tous me faisait penser au slogan trotskien de naguère selon Lutte ouvrière : « augmentation égales pour tous », très populiste mais prendre les ouvriers et les bourgeois pour des cons.

Une classe ouvrière pure comme la prière à genoux des ouvriers polonais ? Le CCI qui n'a pas peur de ses contradictions ou de sa perte de contact avec la réalité déplore un jour une perte d'identité de la classe ouvrière puis utilise une phrase idyllique de Marx, que je soupçonne trafiquée :

«  "Il y a bien un noyau matériellement déterminé, une avant-garde pratique de la classe-pour-soi (ouvriers des grandes entreprises), mais ce noyau, en sortant du rapport capitaliste, tend, d’emblée, à précipiter “l’imminence du passage des classes moyennes au prolétariat” (Marx). […] Le “danger” de dissolution du prolétariat dans la population n’existe pas".Depuis 1848, l’autonomie de classe est un principe intangible du combat prolétarien. Elle est le fil conducteur qui relie les luttes partielles des ouvriers à la dictature du prolétariat. Avec la perte de l’identité de classe que l’on peut constater aujourd’hui, le poison de l’interclassisme est d’autant plus dangereux. On peut voir ici comment le modernisme fait le travail de la bourgeoisie »6.

Si la citation de Marx est authentique, eh bien Marx s'est complètement gourré pour aujourd'hui encore. Tant pis pour ses adulateurs religieux. Le passage imminent des « couches moyennes » au prolétariat, j'y ai consacré trois articles et il n'est ni automatique ni facile ; la perte d'identité (en partie) effective prouve que la dissolution du prolétariat dans la population est encore effective.

AUX ORIGINES D'UN CCI PEU MARXISTE

Au début des années 1970 je faisais mon apprentissage politique dans le milieu héritier de « Socialisme ou Barbarie », les militants de « Pouvoir Ouvrier » diffusaient à l'entrée du lycée Buffon depuis 1967, et formèrent une nouvelle génération de jeunes marxistes, dont mon mentor feu Jean-Pierre Hébert (nous étions les deux seuls fils d'ouvrier en classe de première philo).

RI n'était pas considéré comme marxiste et était daubé par les vieux de PO. RI des décadentistes pouah ! J'avais demandé son avis à Pierre Souyri avec mon désir de prendre contact avec ce groupe à la revue austère mais qui me paraissait plus cohérent que la multitude des groupuscules. Il avait exprimé un avis défavorable, disant : « je me méfie de ce genre de groupes ».

J'avais été invité à une réunion de PO à la Bastille où étaient présents les historiques : Véga, Pierre Souyri, Jacques Signorelli7. et la nouvelle génération: le facétieux Vouvray, Pierre Souyri junior, Serge Cosseron futur éditeur et historien (fondateur de "Camarades") et le brillant leader de la G.M. Vladimir Marcus (qui finira sa courte carrière politique en tant que permanent syndical à la Poste).

PO fermait boutique et pendant les mois qui suivirent j'ai été associé à la création de brûlot « Gauche marxiste » où passèrent des comètes du futur Robin Goodfellow et le lycéen Christophe Bourseiller, merdeux qui nous proposait de prendre les armes et faire la révolution tout de suite.

Enfin je pris contact avec RI dans des conditions pour le moins étrange. Le premier s'appelait Guy Sabatier. L'air piteux il me serra la main : « j'ai été chargé de venir te voir mais je quitte cette organisation ». Bon et ensuite. Ensuite c'est au café en face le jardin du Luxembourg que je serre la main à un certain Raoul Victor, particulièrement affable et emphatique, il me rassure tout de suite et m'explique clairement des choses qui n'étaient pas encore évidentes pour moi. Ou qui demandaient réflexion. Parlant de mon milieu professionnel, EDF, j'en vins à parler d'aristocratie ouvrière. Erreur coupa-t-il : « l'aristocratie ouvrière ça n'existe pas, c'est une connerie des bordiguistes !

Ironie du sort plus de quatre décennies écoulées je découvre un vieil article de ce même Raoul Victor dans un article de leur Revue Internationale en 2005. Interloqué ! Serait-il revenu dans l'organisation qui l'avait éjecté ? Bien sûr que non, c'était la reprise d'un de ses articles en 1981.

Ce qui m'apparut affligeant c'est non pas l'article mais le fait que le CCI ait réimprimé autant d'âneries .. anti-marxistes.

DECRYPTAGE du texte d'un étudiant inculte

Au lieu de se placer dès le départ du point de vue classique de Marx, Engels et tous les autres, on nous assène que « cette théorie repose sur une analyse sociologique qui ignore le caractère de CLASSE HISTORIQUE du prolétariat ; que la définition, ou plutôt LES définitions de "l 'aristocratie ouvrière" sont d'autant plus floues et contradictoires que le capitalisme a multiplié les divisions au sein de la classe ouvrière;que le RESULTAT PRATIQUE de ce genre de conceptions n'est autre que celui DE DIVISER LES TRAVAILLEURS pour la lutte, d'isoler les travailleurs des "couches les plus exploitées" du reste de leur classe ».

Le raisonnement défie la logique, faisant défiler des considérations aussi éculées les unes que les autres...Quand parfois l'étudiant reconnaît implicitement l'existence de catégories privilégiées mais en restant vague8. Plus loin on trouvera le même raisonnement abscons et con pour esquiver la réalité de l'aristocratie ouvrière« La théorie suivant laquelle les partis de gauche et leurs syndicats seraient les défenseurs des intérêts d'une "aristocratie ouvrière" entretient d'une façon ou d'une autre l'idée qu'il s'agit tout de même d'organisations ouvrières, même si ce n'est que partiellement ». Les partis de gauche sont les représentants de l'aristocratie syndicaliste, et contrairement à ce que gribouille notre étudiant, quand un ouvrier affirme cela ce n'est pas pour considérer que ces cuistres sont encore ouvriers ! A moins d'être une nullité gauchiste. A-t-il jamais entendu parler des riches Comités d'Entreprises? Comme par exemple le comité d'entreprise d'EDF, une véritable mafia gérée depuis 1945 par les ingénieurs (les patrons) et les syndicats, surtout la CGT, où postes honorifiques, voyages, cessions de terrain avec les municipalités staliniennes sont historiques et discontinus jusqu'à ce jour. Pourrait-il nous apporter un tel exemple de vacances peu chères, d'octroi de postes sans aucun rapport avec l'industrie pour de soit disant représentants du personnel, dans la plupart des boites privées ou d'autres nationalisées?

Autre avantage non négligeable, les mineurs sont rattachés à EDF depuis toujours, à chaque fermeture ils ne risquaient pas le chômage mais étaient intégrés immédiatement dans les industries et agences d'EDF. Ce n'était en rien dû à une pression ouvrière, comme il le suppose dans sa naïveté d'étudiant, mais bien une prévenance de l'Etat bourgeois qui a appris depuis l'avant-guerre, sans oublier le danger bolchevik enfoui, qu'il faut créer non pas une simple "bureaucratie ouvrière" mais bien des fonctionnaires aristocrates qui cogèrent, participent pleinement aux décisions managériales comme aux décisions à la place des ouvriers. Je pense malheureusement que cette vision irénique d'une classe ouvrière pure, sans corrompus à la manoeuvre, provenait de Chirik qui avait bossé toute sa vie dans de petites boites avec un soupçon d'idéalisme qu'il avait transmis à son fils spirituel Raoul.

Avant d'être une classe historique (comme toutes les classes, sic!) le prolétariat existe sociologiquement (constat qui n'est pas apolitique), et les deux aspects ne s'opposent pas ! Si le capitalisme a multiplié les divisions dans la classe ouvrière cela n'a rien de flou que d'y inclure la notion d'aristocratie ouvrière. En plus ce n'est pas la conception qui divise les travailleurs mais l'usage qu'en fait la bourgeoisie ! Les avantages et le corporatisme des employés des banques, de l'EDF, de la SNCF sont bien réels et...historiques, comme je viens de le démontrer et le démonter. Le jeune étudiant Raoul n'était pas encore informé des incroyables concessions de la bourgeoisie française en 1945, début de la « reconstruction » où jamais autant d'avantages sociaux n'avaient été accordés. Les nationalisations si ce n'est pas la construction d'une aristocratie ouvrière, les usines Renault ne produisaient que des poupées en celluloïd ! La bourgeoisie est consciente de l'intérêt de mettre en place des privilèges pour les secteurs les plus concentrés et dangereux en cas d'explosion sociale. Hitler avait veillé durant toute la guerre à ce que ses soldats n'aient pas faim , au souvenir lancinant de l'insurrection à Berlin , plus militaire qu'ouvrière, qui avait stoppé la guerre mondiale. Poutine lui-même ne gouverne pas simplement par la terreur mais en maintenant de hauts salaires dans les secteurs stratégiques. La lutte pour les salaires n'est plus spécialement révolutionnaire9.

Les syndicalistes apparaissent en général aux yeux des ouvriers comme des gens qui se prennent pour l'élite. Un chef syndical à EDF peut passer automatiquement agent de maîtrise sans connaître le travail. En mai 68 l'aristocratie ouvrière (syndicale) a pour consigne d'empêcher la grève de ce secteur déterminant pouvant paralyser le pays.

Raoul aurait-il frôlé préventivement les délires wokistes, les racismes et anti-racismes divers, en ignorant qu'au temps du colonialisme il y avait en effet une classe ouvrière aristocrate blanche et pas « marxiste-léniniste » : 

« C'est ainsi par exemple que certains groupes développent parmi les travailleurs immigrés dans les pays les plus industrialisés d'Europe un racisme particulier qui remplace le racisme classique "anti-blancs" en un racisme "marxiste-léniniste" anti-aristocratie-ouvrière-blanche.  Dans des pays moins développés, exportateurs de main d’œuvre, c'est à faire de 1"'anti-ouvrier-qualifié" parmi les ouvriers les moins qualifiés que se dédient les défenseurs de cette théorie ».

Depuis 75 ans ce n'est pas pugilat qu'il s'agit dans les parties de la classe ouvrière mais de préservations corporatives. Depuis 75 ans chaque fois qu'une petite usine ferme à côté d'un service public on n'a pas vu leur agents soutenir les licenciés ; ou plutôt si, ce sont les appareils syndicaux, CGT en tête qui viennent apporter leur...soutien pour isoler encore plus les victimes des restructurations capitalistes. Et la dernière phrase en majuscules est complètement hors-sol politiquement...et sociologiquement.

 « Depuis 75 ans, lorsque les ouvriers luttent sur leur terrain de classe, ce à quoi on assiste, ce n'est pas à un pugilat entre fractions de la classe ouvrière, mais au contraire à une unification sans précédent dans l'histoire.  LE PROLETARIAT EST LA PREMIERE CLASSE DANS L'HISTOIRE QUI N'EST PAS DIVISEE EN SON SEIN PAR DE REELS ANTAGONISMES ECONOMIQUES ».

Et le récent scandale pour les privilèges dingues attribués aux agents de la SNCF pour une pré-retraite en or?

Lénine est autrement plus sérieux que le petit Raoul :

« La base économique du chauvinisme et de l'opportunisme dans le mouvement ouvrier est le même ; l'alliance des couches supérieures, peu nombreuses, du prolétariat et de la petite bourgeoisie, qui reçoivent les miettes des privilèges de "leur" capital national contre les masses ouvrières et contre les masses travailleuses opprimées en général".("La faillite de la II" Internationale)

Engels est aussi clairvoyant sur le recours par la bourgeoisie à la corruption des ouvriers10. Les masses en 1914 ne sont pas vraiment partie la fleur au fusil, comme l'ont démontré depuis des décennies plusieurs historiens. Cela signifie bien que des syndicalistes aristocrates à la suite d'un Gustave Hervé ont pesé pour l'entrée en guerre, avec l'argument de récupérer rapidement l'Alsace et la Lorraine.

La phrase de conclusion est la plus incongrue, qui se mord la queue avec tant de stupidité : « Rejeter les syndicats pour diviser autrement, c'est à cela que conduit l'anti-syndicalisme fondé sur "l'anti-aristocratie ouvrière"11.

Corrigeons, oui les termes "aristocratie ouvrière" ont une connotation dépassée, et continuer à les utiliser ce serait une concession au marxisme gauchiste qui qualifie les partis de la gauche bourgeoise de "partis ouvriers". Actualisons pour que Raoul comprenne mieux. Désormais je parlerai d'aristocratie corporative  et syndicale !

Enfin pour ma conclusion, l'incapacité du CCI à dénoncer plus largement un certain nombre de mystifications dans l'entreprise et hors de l'entreprise, qui salue le travail...syndical de Lénine, qui croit que la bourgeoisie « cherche à instrumentaliser la décomposition contre la classe ouvrière », est à côté de la plaque. La bourgeoisie ne cherche pas à instrumentaliser elle instrumentalise pas en soi avec sa démocratie fielleuse ni avec ses entraves syndicales, mais par le féminisme, l'islam qui remplace par endroits les syndicats, l'écologie, un modernisme qui dissout les classes, une négation du problème migratoire, des augmentations de salaires « quoiqu'il en coûte » aux secteurs dangereux pour l'ordre social, et. etc.

« Alors que la classe dominante cherche à instrumentaliser la décomposition de sa propre société contre la classe ouvrière et à créer une unité nationale derrière l'État par des campagnes sophistiquées pour défendre la démocratie, la classe ouvrière ne doit pas se laisser duper par ces campagnes idéologiques. Un véritable combat de classe ne peut se déployer qu’en se débarrassant des entraves syndicales et en comprenant que les intérêts entre Capital et Travail sont opposés, que ce système nous mène dans une impasse »12.

Hélas le CCI ne dit rien des principales campagnes idéologiques principales qui affectent le prolétariat. Il radote des généralités éculées jetées en l'air. Il n'est en rien subversif. Pire il ne sert à rien contrairement à son glorieux passé. Une organisation aussi vieille dans le mouvement marxiste, ça n'a jamais existé », disait Clara la veuve de Marc. Si elle existe. Et vivote dans ses charentaises.

NOTES

1LEFEBVRE_Henri_-_Critique_de_la_vie_quotidienne_I.pdf (monoskop.org) lisible donc sur le web et que je conseille vivement aux jeunes générations qui lisent ici.

2Cet écrit qui date de 1971 et auquel j'ai fait référence dans la première partie de cet article, prouve en tout cas que le concept de décomposition a été inventé par Lefebvre 30 ans avant le CCI, c'est à dire par Marc Chirik à la fin des années80, grand lecteur de Lefebvre mais seulement pour les citations, disait-il. Il faut rappeler quand même l'importance du travail de dénonciation d'Althusser,le philosophe principal des maoïstes ,par Lefebvre.

3Une mauvaise leçon de Marc Chirik, que j'avais questionné :

- Marc crois-tu qu'on peut faire confiance au prolétariat ? - oui il ne faut jamais douter du prolétariat ! Eh bien moi je doute du prolétariat aujourd'hui par exemple en Russie où il s'avère incapable de stopper la guerre.

4« Le Prolétaire appelle, tout d’abord, à une lutte pour mettre fin à « l’oppression par Israël des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie », ce qui exclut, par la suite, toute solidarité avec la classe ouvrière d’Israël qui est « prisonnière des avantages immédiats et complice de cette oppression ». Un autre groupe, le PCI (Il partito comunista), semble défendre des positions internationalistes convaincantes lorsqu’il écrit : « Nous devons appeler les prolétaires palestiniens et israéliens à ne pas se laisser berner par leur bourgeoisie […], à ne pas s’immoler comme chair à canon dans des guerres contraires à leurs intérêts ». Mais dans la phrase suivante, il ajoute : « Nous devons appeler les prolétaires Juifs israéliens à saboter l’effort de guerre de leur bourgeoisie impérialiste et génocidaire et à lutter contre leur bourgeoisie et contre l’oppression nationale de leurs frères de classe palestiniens ». (6) Il n’appelle donc pas ici à la solidarité internationale de tous les prolétaires... » ri-501_bat.pdf (internationalism.org)

7Une trentaine d'années plus tard j'ai porté à cette homme un exemplaire de l'histoire de SouB par Lucien Laugier que j'ai édité avec une longue post-face de ma part. Il me fît savoir avoir apprécié le texte critique de Laugier mais pas le mien. Je pense qu'il avait raison, j'étais très dur avec ce groupe, à la manière sectaire CCI. SOB avait été quand même une rare lueur révolutionnaire dans les fifties. C'était peu avant la mort de Jacquy, membre fondateur de RI éjecté puis traîné dans la boue. Tous deux habitaient le même groupe d'immeuble à Sceaux et j'ai regretté de ne pas les avoir fait se rencontrer. SOB avait des moyens éditoriaux plus riches que la pauvre GCF et produisait des articles plus denses et mieux argumentés, même si on ne doit pas oublier la plus grande clarté politique de cette Gauche Communiste de France.

8 « Mais, il faut pour comprendre de tels miracles ne pas avoir les yeux fixés, tels les sociologues, sur la réalité IMMEDIATE de la classe ouvrière LORSQU'ELLE NE LUTTE PAS.  Lorsque le prolétariat ne lutte pas, lorsque la bourgeoisie parvient à subvenir au minimum social nécessaire pour la subsistance des ouvriers, ceux-ci se retrouvent effectivement totalement divisés. » Et ce n'est pas une division en général, il faut préciser : privé, public, fonctionnaires, petits boulots, chômeurs...

9Le salaire reste la première source de préoccupation des travailleurs français en 2024, révèle une étude du cabinet Randstad, leader mondial dans le secteur des ressources humaines. Cette année, près d'un salarié sur deux (43%) déclare qu'une rémunération trop faible face au coût de la vie reste le principal motif pour changer d'employeur, tout comme en 2023. Une raison qui demeure d’autant plus importante que le pays a traversé des mois de forte inflation. Deux travailleurs sur cinq affirment n’avoir reçu aucune compensation par rapport à la hausse des prix et parmi eux, près de la moitié envisage de quitter leur employeur.

10En 1892, Engels écrit que le capitalisme anglais était passé à une nouvelle phase après 1848 : délaissant les petits profits tirés de l’escroquerie de ses clients et des ouvriers, les capitalistes étaient passés à une exploitation en grand, couverte par le pouvoir d’État et nécessitant une certaine stabilité sociale. Ce faisant, il était tolérable d’augmenter les salaires et d’améliorer la situation de certains ouvriers, afin d’éviter les grèves et de régulariser la production. Cela permettait d’augmenter les profits de l’ensemble des capitalistes en tant que classe par l’augmentation de la production, et non en se battant sans fin contre les ouvriers et les concurrents ».

11Ce texte navrant publié en 1981 est republié tel que par le CCI en 2005 !!! bravo pour cet historique de la bêtise ! R.V. revue Int. 1981

mardi 14 mai 2024

LE DRAPEAU ET LA REVENDICATION (première partie)

 


 En Russie, notamment après 1905, lorsque les plus intelligents des bourgeois ont vu clairement combien la force brutale était insuffisante à elle seule, toutes sortes de partis et de groupes bourgeois «progressistes» usent de plus en plus souvent du procédé de la division des ouvriers par la diffusion de diverses idées et doctrines bourgeoises qui affaiblissent la lutte de la classe ouvrière. Au nombre de ces idées, il faut ranger un nationalisme raffiné, qui prêche la division et l'émiettement du prolétariat sous les prétextes les plus spécieux et les plus séduisants ; par exemple, sous prétexte de défendre les intérêts de la «culture nationale» de l'«autonomie ou de l'indépendance nationale» etc., etc. » LENINE1


Incontestablement et historiquement, réduire le moteur de la prise de conscience de la classe ouvrière au niveau économique de la lutte pour les salaires ou à une généralisation de somme de corporatismes ou de faux « tous ensemble », est étranger au marxisme, tout au moins au sens où je le comprends, puisqu'il y a plusieurs marxismes et que vous n'êtes pas persuadé de détenir le bon. La classique définition de la conscience ouvrière était résumée par Babeuf : « la peur du lendemain ». Il n'y a pas besoin de mener de longues études universitaires pour comprendre que c'est l'être du prolétariat que l'étudiant soixante-huitard ne pigea jamais.

Heureusement que le CCI dans ses limbes au début des années 1970 compta comme principal fondateur un vieil ouvrier de plus théoricien d'envergure ; quoique le mot vieux qui lui était attribué à l'époque paraît exagéré vu l'âge canonique atteint par la plupart d'entre nous survivants d'une époque plus agitée qu'héroïque. Marc reste à jamais « jeune ». Et le défenseur de ce qu'être ouvrier est « être » comme base de la conscience de l'exploitation et qu'il n'est pas nécessaire que des étudiants ou des bobos lui explique ce qu'il est. Ce fût un des travers de l'époque de 1968 où n'importe que maoïste ou trotskien entretenait d'éduquer l'ouvrier à un marxisme de secte afin de lui expliquer que la révolution était en cours.

Ce fût un des principaux mérite des limbes du CCI -Révolution Internationale – d'être et de rester le principal groupe politique à dénoncer les idéologies modernistes, par après contre un dénommé Bérard, petit juif ergoteur qui, s'arrogeant le succès de la brochure « Rupture avec Lutte Ouvrière », alors que les axes de la critique avaient été définis par tout le groupe, avait cru pouvoir user de cette spécificité pour marchander auprès de Marc un poste à l'organe central. Bernique ! Si Marc fût souvent à l'initiative de nomination à des postes de responsabilité, c'était en faveur de personnes résolument sur des positions de classe. Quant à l'origine ethnique ou nationale des divers camarades, il s'en battait les couilles2.

Récemment leur revue internationale résumait bien la dérive petite bourgeoise idéaliste de Bérard, caractéristique d'une grande partie du monde estudiantin à l'époque, généralement encore futurs cadres du capitalisme comme s'en était moqué Guy Debord...puis du parti bourgeois de la girouette Mitterrand

«Bérard a commencé par rejeter les luttes revendicatives du prolétariat, puis sa nature de classe exploitée, la seule façon qu’il a de résoudre sa "contradiction" consiste tout simplement à nier le prolétariat lui-même. Il a beau vouloir se démarquer de Camatte (qui avait déjà ouvertement rejeté la "théorie du prolétariat") et réaffirmer le prolétariat comme sujet révolutionnaire, l’idée d’une communisation immédiate sans période de transition conduit forcément à rejeter l’autonomie de classe et à noyer le prolétariat dans les autres classes. 

La revue renvoyait à la polémique avec Bérard, qui aurait pu emporter la plupart des militants jeunes et étudiants incultes ; la solidité politique de la réponse sauva l'organisation de la déliquescence gauchiste et moderniste :

«  En mai-juin 1974, sous le titre : Comment le prolétariat est la classe révolutionnaire « est réaffirmée » la position classique du marxisme : "Le processus à travers lequel la classe ouvrière s’élève à la hauteur de sa tâche historique n’est pas un processus distinct, extérieur à sa lutte économique quotidienne contre le capital. C’est au contraire dans ce conflit et à travers lui que la classe salariée forge les armes de son combat révolutionnaire". Il n’y a donc pas deux classes ouvrières mais une seule qui est à la fois exploitée et révolutionnaire. C’est la raison pour laquelle les luttes révolutionnaires sont toujours préparées par une longue période de luttes revendicatives, et c’est pourquoi celles-ci réapparaissent encore au cours de la période révolutionnaire. Et comment pourrait-il en être autrement puisqu’il s’agit de la lutte révolutionnaire d’une classe, donc d’un ensemble d’hommes économiquement déterminés, unis par leur situation matérielle ». "Il y a bien un noyau matériellement déterminé, une avant-garde pratique de la classe-pour-soi (ouvriers des grandes entreprises), mais ce noyau, en sortant du rapport capitaliste, tend, d’emblée, à précipiter “l’imminence du passage des classes moyennes au prolétariat” (Marx) (?). […] Le “danger” de dissolution du prolétariat dans la population n’existe pas"(?) Depuis 1848, l’autonomie de classe est un principe intangible du combat prolétarien. Elle est le fil conducteur qui relie les luttes partielles des ouvriers à la dictature du prolétariat. Avec la perte de l’identité de classe que l’on peut constater aujourd’hui, le poison de l’interclassisme est d’autant plus dangereux. On peut voir ici comment le modernisme fait le travail de la bourgeoisie ».

Dans les arguments de Bérard on trouve des parcelles de vérité  (sinon il n'aurait pas autant troublé nombre de jeunes militants estudiantins incultes) Certes il y avait bien chez Bérard une négation des luttes de résistance. "Les luttes revendicatives ne deviennent pas révolutionnaires ; c’est la classe qui, en dépassant et niant sa lutte immédiate, devient révolutionnaire". Plus encore, le prolétariat devait nier non seulement ses luttes immédiates mais aussi son être de classe exploitée.

Il y a des luttes de résistance qu'on le veuille ou non, que le CCI les approuve ou que Bérard les nie. Le problème n'est pas là mais : à quoi servent-elles ? Sont-elles toutes équivalentes et révolutionnaires ?

L'origine de la théorie moderniste, personne ne le souligna à l'époque, était un produit de la décomposition du stalinisme qui, tout au long de cinquante années, avait noyé cette classe ouvrière sous le parti totalitaire puis continuait de la...nier.. Tâche accomplie par ce néo-stalinisme dont le maître à penser des situationnistes, Henri Lefebvre soufflait à l'oreille de Bérard, la révolution est destinée à être « conjoncturelle » :« Les revendications économiques tendent à retomber en arrière par rapport aux revendications politiques visant la gestion et le fonctionnement global de la société^ et en particulier les syndicats (Lénine le note à plusieurs reprises) ont une tendance à l'étroitesse. Le léninisme apparaît donc comme un anti-ouvriérisme ; d'autre part il montre le caractère conjoncturel de la révolution politique, caractère conjoncturel d'autant plus important que certains objectifs révolutionnaires peuvent s'atteindre par en haut ; mal certes, mais tous les objectifs de la transformation de la société ne s'atteignent pas « démocratiquement » de bas en haut ; ils peuvent aussi être imposés par le haut. Il faut une pensée politique pour que la classe ouvrière devienne capable d'envisager des objectifs concernant la société tout entière ; il faut une analyse globale et une stratégie ; il faut un concept de la totalité. La classe en tant que classe n'est pas la totalité de la société. .Donc. la révolution ne peut avoir lieu que conjoncturellement, c'est- à-dire dans certains rapports de classe,, les paysans, les intellectuels entrant dans cet ensemble de rapports. La classe ouvrière n'est pas révolutionnaire en soi, par soi, pour soi ; il n'y a pas d'essence ou de nature révolutionnaire de la classe ouvrière »3.

Le souvenir mythologique du CCI sur la fameuse grève de masse en Pologne en 1980

L'immense grève de masse en Pologne ne peut être oubliée, encore faut-il la resituer dans son contexte par rapport à aujourd'hui et observer d'un œil plus critique que celui du CCI 40 années plus tard. Redites annuelles et répétitions d'époque « essentialisées ». Une étude postérieure de qualité confirme concrètement pour l'essentiel l'être de la classe ouvrière et ses capacités inouïes pour prétendre gérer la société4. Cette expérience inoubliable fout par terre le modernisme néo-stalinien.

Mais, dans notre lointain a posteriori, il faut quand même en faire la critique. Deux remarques, un : le mouvement éclata dans le monde stalinien avec une forte propension à se faire récupérer hors de tout processus révolutionnaire (la revendication de syndicats libres). Deux : tous, y compris les rédacteurs dithyrambiques du CCI aujourd'hui, nous avons été choqué et interloqués qu'un tel mouvement se transforme en Solidarnosc !

L'explication première du début du mouvement par le CCI est strictement économiste, or c'est faux, le mouvement est conditionné par la mémoire ouvrière et la brutalité du « régime socialiste » :

« En juillet 1980, c’est la suppression des subventions des prix à la consommation (la viande vendue directement aux ouvriers sur leur lieu de travail augmente brutalement de 60 %) qui provoque des grèves dans la banlieue de Varsovie et dans la région de Gdansk ».(CCI)

Le mouvement n'est pas spontané en soi, il est « historiquement » fondé. J'ai toujours trouvé creux ce terme de spontanéité, bon pour les anars. 1980 c'est aussi 1956 et 1971. Il ne tombe pas du ciel « conjoncturellement » ni pour la viande. Les Lefebvre et Bérard oublient qu'il existe toujours une mémoire de classe qui n'a pas besoin d'historiens ni de militants ouvriéristes. Le mouvement est multiple selon les régions et le type d'ouvriers, urbains, issus de la campagne (souvent les plus déterminés), les régions comprenant nombre de récents immigrés (très combatifs). Il se déroule une grève dans une industrie textile contre une baisse des salaires.

Cette grève débute au mois de juillet 1980. On ne note aucun meneur précis lorsque les travailleurs de la première équipe décident d'arrêter les machines, à six heures. La grève se propage grâce aux informations que transmettent les ouvriers en se déplaçant d'atelier en atelier. Les revendications sont formulées le second jour. Elle concernent l'approvisionnement d'abord (meilleurs produits dans les kiosques d'entreprise ; surveillance de la distribution des articles alimentaires ; amélioration de l'approvisionnement). Elle n'est donc pas exclusivement (et corporativement) salariale mais déborde sur la société et confronte l'Etat stalinien incapable de souplesse contrairement à l'Etat libéral occidental. La grève se déroule dans un certain climat de nervosité (peur de la répression brutale habituelle). Certains ouvriers rappellent que des grèves avaient également eu lieu en 1971 et que cela avait donné lieu à des licenciements. Cette fois, la grève ne dépasse pas le troisième jour et s'achève par la décision du directeur d'augmenter les salaires de trois cents à cinq cents zlotys.

Les spécificités de la région de la Baltique et du Sud-Ouest silésien, moteurs en 1980 et 1981, régions à fort taux d'immigrants venus des terres accaparées par les Soviétiques à l'issue de 1945. Le sentiment national et même antisoviétique y est puissamment ancré. De plus, pour les premiers, leur situation géographique a favorisé une ouverture au monde nordique et occidental. Ceci révèle l'importance des facteurs historiques dans le déclenchement des grèves.

On ne l'a pas noté à l'époque mais l'éclosion de ce mouvement sous un régime prétendu « dictature du prolétariat », a très vite posé les questions politiques de la société comme aucun mouvement gréviste d'ampleur ne l'avait posé en Occident même en 1968 dont la « victoire » avait été une hausse générale des salaires et d'importantes concessions immédiates de la bourgeoisie. Dans la généralisations les revendications ne sont plus « immédiates » 

« Les causes internes. Elles sont les plus importantes, comme nous l'avons dit, et, si elles démarrent à l'occasion d'un phénomène anodin et maintes fois vécu, elles donnent très vite lieu à des revendications ordonnées autour de quatre grands axes : l'organisation du travail, les relations avec l'administration et la maîtrise, le système de salaires, les affaires sociales. Dénoncées également les pratiques de favoritisme, les tendances autocratiques des petits chefs et même, les harcèlements sexuels, tous phénomènes qui génèrent une atmosphère de travail nuisible aux relations humaines. Une chose est claire, le syndicat (d'Etat « communiste ») s'est révélé complètement incompétent lors de ces événements, faute de disposer d'une quelconque autorité parmi les travailleurs. Le mouvement massif des ouvriers polonais - s'il s'avère surtout être le meilleur environnement pour favoriser l'émergence d'une conscience de classe communiste et de mettre en branle des attitudes historiques qu'on croyait révolues (« la mémoire est bien là) -, est limité par le retour d'une mentalité trade-unioniste, c'est-à-dire revendicative, référable à une société divisée en classes ». Et qui débouchera sur l'mpasse Walesa5.

« Or la mémoire est bien là et, avec elle, la conscience d'un intérêt différent de celui des employeurs. (Ce trait n'est pas spécifique de la grève dans une société de type soviétique. Les mouvements de protestation du XIXe siècle témoignent de pareille émergence. On n'aurait pas de mal non plus à montrer qu'en Occident de nombreuses grèves sont le fait des travailleurs qui ne se trouvent pas dans la pire situation matérielle (NB, aujourd'hui le CCI a une tendance très ouvriériste et trade-unioniste à radoter la misère comme principal facteur de révolte)

Enfin, fin du fin, la leçon principale reste, non pas telle ou telle revendication ni dépassement de la revendication mais que la grève devienne politique en sortant de l'usine car pour le patronat et l'Etat polonais il fallut : «  éviter que la grève ne se propage. A cet égard, le pire qui puisse arriver est bien — comme cela se passe parfois — que les ouvriers sortent de l'entreprise pour réclamer des comptes à la seule autorité qui vaille, le bureau régional du parti. Pour cette raison, la grève n'est pas cantonnée ni dans un lieu précis ni dans une forme précise puisque la revendication politique dont on a vu la pérennité déborde largement le cadre de l'entreprise »..

Le CCI serait-il devenu moins lucide que Charlie Hebdo ?

«1er mai : ...un cortège où résonnait de temps en temps L'Internationale, qui, comme son nom l'indique, est un chant révolutionnaire, mais où je n'ai jamais vu autant de drapeaux différents. Des drapeaux rouges et noirs, certes, un peu. Mais surtout une bigarrure de drapeaux nationaux brandis par les porteurs de causes identitaires : palestinien, de loin le plus représenté, syrien porté par des membres de l'opposition, breton, colombien ; ceux de la Kanaky et de la Kabylie...Un seul manquait à l'appel : le drapeau tricolore de la Révolution française ». 1er mai, la lutte des classes enterrée par la haine identitaire ». Charlie Hebdomadaire

Dans les articles souvent longs et répétitifs ou l'on glose sur un prolétariat messianique, deux principales divisions organisées par la méchant bourgeoisie sont radotées jusqu'à plus soif : le danger nationaliste et les méchants syndicats.

On y décrit une curieuse solidarité, plus du domaine du fantasme que de la réalité, avec une ignorance totale de l'aristocratie ouvrière (aussi une corruption ouvrière selon Lénine) et donc de la puissance de l'Etat bourgeois pour pérenniser une des divisions fondamentales(depuis 1945) et toxique de la classe ouvrière. Sans oublier l'exaltation syndicaliste de la fumeuse lutte pour les retraites...hiérarchisées.

Je traiterai de cette absence de lien avec la réalité, comme de cette incapacité à compter au nombre des divisions et du sabotage de la lutte de classe avec toutes les théories sociétales gauchistes ou nationalistes, en particulier la guerre à Gaza où ce n'est pas un simple nationalisme contre un autre nationalisme, mais l'introduction de clivages religieux, raciaux, terroristes avec l'appui pervers de la clique à Mélenchon, mais de l'autre côté tous les artistes juifs en France qui se solidarisent avec le criminel de guerre Netanyhaou. Sur toutes ces divisions, propagandes ethniques, le CCI ne dit rien. Tout se passerait dans l'usine, sans conscience ouvrière sortant des murs avec un CCI qui lui répète sas cesse ce qu'elle sait déjà, une autre guerre mondiale menace l(humanité.


A suivre..


NOTES

2Il y aurait une autre explication à mon sens du virage moderniste de Bérard, son besoin de théoriser en « plus radical » un marxisme plutôt anarchiste pour se venger du « vieux ». C'est en tout cas ce type d'explication que j'avais retenu de la déviation bordiguisante de Camoin, petit personnage toxique, à la suite du refus de le nommer à l'organe central où il se voyait siéger « naturellement » en tant que membre fondateur ! Il s'était plaint auprès de moi contre cette vacherie. Toute organisation comporte toujours des personnages toxiques PN. C'était le cas du dénommé Pédoncule, pas vraiment voyou comme cela lui est reproché dans la diatribe « Docteur Bourrinet et son voyou ». Il fût dévoué et militant convaincu ; j'avais supposé qu'il était flic pour cette habitude d'humilier le militant sans affectation hiérarchique mais pas les cadors brillants et empathiques tels R.Victor et CG. Trouillard névrosé il portait toujours sur lui un opinel ; couteau de défense le plus bête que je connaisse, utile en camping mais risquant de se replier sur les doigts de son utilisateur comme arme présumée de défense. M'enfin on le savait, et lors d'un tractage à l'usine Renault-Cléon, j'avais exigé qu'il dépose ce couteau dans le coffre de ma voiture. Sur les différentes scissions, expulsions, fuites, le CCI perd trop de temps dans des détails dont leurs lecteurs n'ont rien à foutre, qualifiant celui-ci de policier, cet autre de salopard, alors que Bordiga répondait simplement : « Les arrivistes et les parasites du mouvement prolétarien nous ont abandonnés en grand nombre » .

5Lorsqu'il est venu en France c'est moi qui lui ai donné le tract du CCI.

lundi 6 mai 2024

QUESTIONS POUR UN CHAMPION

 


QUESTIONS POUR UN CHAMPION

DES CANDIDATS EN COSTUME TOUS EN FAVEUR DE LA GUERRE

« Découpez ses vêtements pour qu'on puisse voir ses blessures », cria quelqu'un.« Oh, pensai-je, mon beau costume Ralph Lauren ».

Salman Rushdie. Le couteau (page 31)


Années de vérité vraiment en 2024, comme disait naguère le CCI... Fallait bien que cela arrive une année. Je prends le pari pour celle-ci. Paroles de vérité sont les déclarations d'une union nationale et accessoirement européenne pour faire internationaliste...occidental par tous les champions de l'éventail bourgeois en lice. Catalogue.

Seule allusion (secondaire dans les confrontations) lorsque Aubry a rétorqué à Bardella qu'il se soucie plus des patrons que des ouvriers. Le jeune loup Bardella ne montre jamais ses crocs contre le capitalisme.

«Les Ukrainiens ne nous demandent pas des troupes au sol mais des armes et des munitions», a affirmé le champion LR, François-Xavier Bellamy, version moins radicale que celle du général Macron.

«Demain, si la Russie gagne en Ukraine, nous serons aussi attaqués. C’est un risque et nous ne devons pas faire le jeu de la Russie», a martelé de son côté la championne macroniste Valérie Hayer, reprenant les mots de son chef de l’État.

Pour faire barrage à la diabolisation dont il était l'objet facile, le populiste bien mis Bardella (seulement 1M87 et pas 1M90) a commencé par assurer que le RN n'est pas le seul à avoir des accointances avec Poutine et à professer un pacifisme qui est toujours complémentaire au bellicisme nationaliste : «Est-ce que vous pouvez nous rappeler quel est le premier pays européen importeur de gaz russe ? C’est la France d’Emmanuel Macron !», ce champion visant au passage Valérie Hayer. L’eurodéputé RN a ensuite résumé la ligne du parti à la flamme : «l’Europe doit renouer avec le sens de la souveraineté et l’indépendance (...) Il faut soutenir l’Ukraine et éviter l’escalade avec la Russie.»

La championne écologiste transparente Marie Toussaint a quant à elle plaidé pour «une armée de défense européenne» pour mieux mutualiser le soutien à l’Ukraine.

 La populiste Manon Aubry, mauvaise championne a très vite décoché à son tour une flèche en direction de Bardella, épouvantail de LFI et des gauchistes, mais avec des arguments minables : «On ne vous a pas beaucoup vu au Parlement européen. Vous avez déposé 21 amendements en 5 ans, et moi 3200. Vous n'êtes plus le parti à la flamme nationale mais le parti à la flemme nationale.»

Marion Maréchal a étrillé la «volonté d’armée européenne», qui entraînerait selon elle «la création d’un super Etat fédéral européen».  Donc aux ordres du petit maréchal Zemmour : « tous aux abris » !

«Ceux qui refusent la construction d'une défense européenne sont pour l'affaiblissement de la France et sa vassalisation éternelle», a opposé le nouveau champion des socialistes, Raphaël Glucksmann (seulement 1M81 alors que tous les médias le placent devant pour le faire passer plus grand que l'encravatté Bardella, dont le tic – rabattre sans cesse sa veste – prouve qu'il pourra la retourner n'importe quand).


La popularité du jeune loup enviée par tous les autres champions

La popularité de Bardella repose sur trois critères : il apparaît comme beau, élégant, presque comme Chirac jeune mais avec un phrasé moins débile et renvoie au musée mamie Le Pen qui sent la naphtaline. Deux il répond au besoin de sécurité légitime du peuple sans minorer la forte proportion d'étrangers dans les délits et crimes sur lesquels la gauche bourgeoise et ses bobos font l'impasse (d'où leur chute sondagière irréversible). Trois, comme chef de file de plus en plus mis en lumière contrairement à ses lieutenants, il correspond à la traditionnelle croyance populaire qu'un type, même et surtout arrogant, paraissant au-dessus du lot, va être tendancieusement un sauveur suprême. Ce phénomène est particulièrement visible en Russie (comme en Algérie) où le peuple idiot pense que le limogeage régulier des mafiosos est dû au prince honnête et incorruptible Poutine. Or, même s'il clame quelques vérités gênantes sur les arrivées en effet massives des malheureux migrants, supposant au pouvoir, il serait contraint lui aussi de continuer à faire appel à des centaines de milliers comme Meloni en Italie (comme le lui a dit Aubry). Quant à sa liste de candidats elle comporte tant de crapules arrivistes que cela devrait plutôt renforcer l'abstention pour cette clique. Ce succès personnalité pour un jeu culotté de 28 ans explique son top au hit parade des champions de la défense du capitalisme électoral. Les bobos « pas de vague » l'ont dans le cul et le gouvernement n'a que le menteur Darmanin pour faire croire qu'il a expulsé plus de6000 malfrats étrangers cette année. C'est faux, sont expulsés surtout des travailleurs sans papier dont restauration et bâtiment ont tant besoin.

Jordan Bardella et Marion Maréchal ont défendu un tournant de «fermeté» et de «dissuasion»  face au débarquement migratoire, qui est en effet anormal si on compare avec les décennies intérieures et qui pose un problème de perte de contrôle des Etats bourgeois sans du tout favoriser l'internationalisme prolétarien :  «On accueille tout le monde, tout le monde rentre et personne ne sort», a raillé le patron du RN, qui réclame la possibilité de «refouler les embarcations»«Notre volonté est de dissuader, d'empêcher et de renvoyer», a résumé sa concurrente blondasse de Reconquête.

Attaqué à plusieurs reprises par la candidate insoumise immigrationnisme irresponsable, Bardella a feint le lapsus rigolo : «Pas du du tout Madame Hamas... Aubry pardon !»2. Façon de s'en prendre aux positions pro-palestiniennes du mouvement mélenchoniste, au cœur des polémiques depuis plusieurs semaines.

Des prises de positions aussitôt attaquées par l’Insoumise Manon Aubry, qui a dénoncé la politique «inhumaine» de l’Union européenne. «La Méditerranée est un cimetière à ciel ouvert, on laisse seuls les États du Sud de l'Europe gérer», a-t-elle dérouléqualifiant Frontex d’«agence de la mort». Et l’écologiste Marie Toussaint de trancher : «J’en ai marre de cette espèce de surenchère de ces croque-morts de la Méditerranée (...) On sait qu'on a besoin de l'immigration. Les gens sont dans une telle situation de misère qu'ils arriveront toujours sur notre territoire.»

Après avoir débattu en face à face avec l'inconnue promue Valérie Hayer, Jordan Bardella a de nouveau interrogé la championne moyenne macroniste : «Est-ce qu’il y a oui ou non trop d’immigration en France ?» L’intéressée lui a répondu : «Vous savez que ce n’est pas le sujet (sic). L’enjeu, c’est la gestion de la régulation de l’immigration irrégulière (...) comment on s’assure qu’il n’y ait plus de jungle de Calais.»

Au milieu des coups bas, le petit François-Xavier Bellamy a souhaité se coller à la question (populaire) de l’eurodéputé RN : «Évidemment, il y a beaucoup trop d'immigration  en France !» Avant de poursuivre : «Le grand sujet, c'est la question de savoir si nous allons réussir à sortir de l'impuissance, en Europe (...) Et si la Méditerranée est un cimetière à ciel ouvert, ce n'est pas parce que l'Europe a des frontières, c'est parce qu'elle n'en a plus.»

Ciblant les interventions de Jordan Bardella, Raphaël Glucksmann a sonné la charge contre l’eurodéputé RN : «Vos slogans d'estrade sur l'immigration zéro, c'est une vidéo TikTok. Ça ne correspond pas à la réalité»(????). «Il faut mettre fin à l'hypocrisie, a-t-il ajouté, car elle crée le chaos et l'indignité pour les êtres humains».

Tout est donc de la faute au « facho » Bardella, merci à tous les champions de la gauche bobo et à ce laid fils de maoïste de permettre à Bardella de monter vers les 40 % !

L'émission Question pour plusieurs champions va encore durer un mois. Faites comme moi, éteignez la télé et allez jouer au ping-pong, l'adversaire rit avec vous des rebondissements inattendus de la balle.

NOTES

1Quatre candidats sont en lice et doivent, lors de 3 manches successives, répondre à des questions de culture générale. Le concurrent le moins performant est éliminé à la fin de chaque manche et le gagnant est le candidat remportant la dernière manche, ce qui lui donne le droit de rejouer à l'émission suivante.

2Bravo quand même quand on assiste aux occupations étudiantes à la queue du nationalisme palestinien avec voiles et vapeurs antisémites.